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A long terme, tout ce qui n'est pas durable n'a qu'une issue : sombrer et disparaître.
Contenu de cette page
- Défis pour atteindre la neutralité carbone en 2050
- Quelle croissance économique ?
- Puits de carbone ?
- Folie numérique et l'Intelligence Artificielle
- Comment réduire la consommation d'énergie ?
- Discours officiels et réalité
- Valeurs d'une société démocratique de 2000 watts
- Relever les défis dans une démocratie
- Photos d'écoquartiers 2000 watts et d'une coopérative d'habitants à Toulouse
- Conférence "Transition énergétique et limites de la croissance verte" (YouTube)
- Conférence "Bien vivre avec la rareté à venir" (YouTube)
- Conférence "Voies vers la transition énergétique et sociale" (YouTube)
Défis pour atteindre la neutralité carbone en 2050
Le livre "Pratiquement durable" essaye de montrer comment nos sociétés modernes peuvent réussir la transition vers une société post-pétrole sans trop de crises. Les défis à relever sont nombreux et certains problèmes gigantesques, mais, depuis 15 ans, les « Ecoquartiers 2000 watts » montrent un chemin prometteur pour réussir cette transition. D'après des calculs de l’École Polytechnique de Zurich, une consommation permanente de 2000 watts (48 kWh par jour) par chaque humain est considérée comme durable et peut être produite par des énergies renouvelables. La consommation actuelle d’énergie de 5000 à 10 000 watts par personne dans les pays développés n’est pas durable. Les calculs et estimations du livre montrent que la neutralité carbone, visée par l'Union européenne (UE), devrait correspondre à une société de 2000 watts, car nous n'aurons pas les moyens de produire davantage d'énergie de manière décarbonée, même en prévoyant une baisse régulière du coût d'investissement des énergies renouvelables et des moyens de stockage de l'énergie. Le livre fait la suposition optimiste que le volume de stockage d'énergie électrique avec le transfert de pompage d'eau sera multiplié par dix par rapport à l'année 2019 et que le reste de l'énergie sera stocké dans des batteries et des systèmes mécaniques. Il est aussi supposé que le stockage inter-saison sera fait par l'hydrogène vert (détails dans le livre).
Le niveau actuel de consommation d'énergie élevé pourrait au mieux durer encore 40 ans, si nous consommons toutes les énergies fossiles facilement exploitables (pétrole, gaz, charbon). Mais nous récolterons alors un réchauffement climatique de 3°C à 4.5°C et toutes les catastrophes et dérèglements qui en découleront, qui auront un coût encore bien plus élevé pour l'humanité que les investissements pour décarboner l'économie. Si les investissements dans le secteur de l'énergie sont multipliés par trois, l'UE pourra remplacer environ un tiers des combustibles fossiles par des énergies renouvelables ou décarbonées au cours des 30 prochaines années [1]. Si en plus aucune centrale nucléaire n'est fermée, nous pouvons créer la société de 2000 watts et la neutralité carbone jusqu'en 2050. Le livre montre qu'il faudrait donc multiplier les investissements dans le secteur de l'énergie par trois et en même temps diviser la consommation d'énergie par deux ou par trois [2].
Voici l'évolution de l'utilisation des énergies fossiles primaires, converties en Tera-Watt-heures (TWh). Montant pour 2019: 135 000 TWh.
Ces 135 000 TWh d'énergie fossile primaire correspondent à environ 100 000 TWh d'énergies utiles dans une économie décarbonée électrifiée. Selon les estimations optimistes, l'humanité devrait investir 240 000 milliards d'euros dans le monde pour remplacer toutes les énergies fossiles par des énergies renouvelables, 55 000 milliards d'euros dans l'Union européenne (UE). A titre de comparaison, 240 000 milliards correspondent à 320 années d'investissement de l'industrie pétrolière ou à deux fois et demie la somme des dettes obligataire de tous les États et entreprises du monde en 2020. En tenant compte de la baisse attendue du coût des énergies renouvelables jusqu'en 2050 et du niveau de recherche dans ce domaine, le livre décrit les hypothèses et méthodes de calcul et leurs résultats concernant les investissements nécessaires pour remplacer les énergies fossiles. Les détails des calculs sont disponibles dans le menu « Téléchargements et Liens ».
Par contre, pour chaque mégatonne de CO2 émise par une centrale électrique au gaz ou au charbon, nous sommes certains qu'elle provoquera le réchauffement climatique au cours des 1000 prochaines années. Comme tous les oxydes, le dioxyde de carbone est une molécule extrêmement stable. Il faut environ 10 000 ans pour que 90 % d'une mégatonne de CO2 émise aujourd'hui disparaisse de l'atmosphère.
En raison des coûts élevés des énergies renouvelables, aucune centrale nucléaire opérationnelle ne devrait être arrêtée pour des raisons idéologiques avant que la neutralité climatique ne soit atteinte ! Dans le cas des déchets nucléaires radioactifs, nous ne savons pas si le stockage définitif dans les couches profondes de la terre causera peut-être des problèmes imprévus dans 1000 ans.Puits de carbone ?
Certains experts recommandent la plantation d’arbres, car les forêts capturent des quantités importantes de CO2 en stockant le carbone dans le bois des arbres. Mais pour un stockage durable, le bois ne doit jamais être brûlé, ni pour le chauffage, ni pour la production d’électricité. Pourtant, le seul groupe Drax GB brûle chaque année 7 500 000 tonnes de bois dans ses centrales électriques. Ce bois est en grande partie importé des Etats Unis où les forêts sont considérées comme des « puits de carbone », même si le bois est brûlé en Angleterre et le carbone est ainsi de nouveau libéré dans l’atmosphère. Par ailleurs, une partie du bois servant aux chantiers de construction finit par être brûlée de même que les meubles déposés dans les déchetteries. Pour ces raisons, l’effet « puits de carbone » des forêts est largement surestimé. Nous estimons que seulement 6% des émissions des énergies fossiles peuvent être compensées par des puits de carbone, à moins de changer radicalement les méthodes agricoles.
Quelle croissance économique ?
En regardant la transition énergétique, il faut tenir compte de la forte corrélation entre la consommation d'énergie et la richesse produite (PIB), puisque notre richesse dépend largement du nombre de machines qui travaillent pour nous quelque part dans le monde, et toutes les machines ont besoin d'énergie. Réduire considérablement la consommation d’énergie implique une diminution des richesses produites par les machines et donc automatiquement une diminution du PIB et desIl existe toutefois quelques exceptions qui permettent de réduire la consommation d'énergie sans diminuer le PIB, comme améliorer l'isolation thermique des bâtiments ou remplacer les chauffages électriques par des pompes à chaleur.
Notre système économique et social présuppose une croissance à tout jamais, ce qui est une illusion sur une planète limitée. La réduction du PIB est une des raisons pour lesquelles l'évolution vers la société post-pétrole peut générer de nombreux conflits. Si la société ne s'organise pas autrement, par exemple selon le modèle des écoquartiers 2000 watts, ces conflits risquent de mettre fin à la démocratie et la prospérité. Les défis financiers sont tels que pendant le temps de la transition vers la société post-pétrole, nous aurons encore besoin de l'énergie nucléaire et il faut garder les centrales nucléaires existantes aussi longtemps qu'on peut garantir leur sécurité. Fermer des centrales nucléaires pour des raisons idéologiques est une preuve d’ignorance des défis financiers pour produire assez d'énergie décarbonée [3] et garder un bon niveau de vie.
Les scenarii de RTE France de 2021 et de l'Ecole Polytechnique Fédérale Suisse arrivent à peu près aux mêmes résultats et conclusions : Il faut diviser la consommation d'énergie par 2.5 ou par 3 ! Cela fera baisser le pouvoir d'achat de 40% à 50%. Mais comment bien vivre avec 2.5 fois moins d'énergie et un pouvoir d'achat en baisse ?
L'augmentation de l'efficacité énergétique grâce aux progrès techniques ne contribue que peu aux économies d'énergie. La plupart des progrès techniques dans le domaine de l'efficacité énergétique sont à nouveau perdus en raison des changements de mode de vie des utilisateurs. Selon des études de l'Agence Internationale de l'Energie (AIE), pour atteindre la neutralité carbone, l'humanité devrait améliorer l'efficacité énergétique de 5% par an au cours des 30 prochaines années. Cependant, au cours des 20 dernières années, l'humanité n'a amélioré l'efficacité énergétique que de 1,5% en moyenne, en commençant par les améliorations les plus faciles à réaliser. Le livre analyse ce problème et propose des solutions.
Les solutions techniques à elles seules ne suffiront pas, quoi que disent les économistes !
Investissements (CAPEX) pour remplacer 90% des énergies fossiles par des renouvelables et du nucléaire. Aussi inclus sont la production d'hydrogène pour le stockage inter-saison et la production d'acier par le processus "réduction directe" et les investissements dans les infrastructures électriques pour tripler le transport d'électricité.
Investissement production et stockage énergie, monde : 240 000 milliards $
Investissement production et stockage énergie, Europe : 55 000 milliards $
Dette cumulée des États et entreprises, marché obligataire : 100 000 milliards $
Les estimations pour produire et stocker l'énergie électrique sont basées sur les données du scénario optimiste du NREL (National Renewable Energy Laboratory). Le scénario optimiste suppose qu'il n'aura pas de pénurie de matières premières pendant les prochains 30 ans et que le coût de l'énergie pour fabriquer les équipements des énergies renouvelables et de leur stockage n'augmente pas. Cette supposition est optimiste, car la moitié des coûts des panneaux solaires et des batteries est déterminée par le prix des matières premières et l'AIE prévoit une pénurie de matières premières entre 2025 et 2030. Avec le scénario pessimiste, il faudrait multiplier les chiffres ci-dessus par deux.
Si donc même le scénario optimiste montre des montants d'investissement au-delà du finançable dans un cadre socialement acceptable, un changement de paradigme s'impose si nous voulons éviter un réchauffement climatique supérieur à 3.0°C !
La folie numérique et l'Intelligence Artificielle
Le livre montre aussi que la téléphonie 5G, l'interconnexion de milliards de nouveaux objets et la multitude de nouvelles fonctions Internet suscitées par la 5G, les Métavers et l'Intelligence Artificielle vont rapidement augmenter la consommation d'électricité. Selon les p révisions de l'Agence Internationale de l’Énergie (AIE) et une étude d’Anders Andrae, ingénieur chez Huawei, cette augmentation ira bien plus vite que l'électricité produite par les nouvelles installations d'énergies renouvelables [4]. Les nouvelles installations d'énergies renouvelables ne remplaceront donc pas l'énergie fossile, elles n'arriveront même pas à fournir l’électricité pour les nouvelles fonctions 5G et Internet. Déjà en 2021, l'ensemble des centres de calcul dans la ville de Francfort consommaient 1.6 fois plus d'énergie que les 400 000 foyers de la ville (FAZ, Serverfarmen in der Stadt, 17/10/2021). D'autres centres de calcul sont en cours de construction.
Le bilan énergétique devient encore beaucoup plus négatif avec les projets de réalité virtuelle aussi appelée "métavers". Le métavers est une représentation virtuelle de la réalité physique, par exemple des rues, paysages, magasins, discothèques et musées. La connexion au "métavers" se fera généralement à travers un casque de réalité virtuelle 3D qui enregistrent et envoient tous les mouvements, images et paroles des personnes connectées à un centre de données. Le "métavers" permettra à des amis, chacun dans son logement avec un casque de réalité virtuelle sur sa tête, de faire des promenades virtuelles ensemble, comme s'ils se promenaient ensemble dans une ville sur Google street-view, ou comme s'ils visitaient le musée du Louvre virtuellement ensemble. Dans tous ces lieux, ils pourront virtuellement rencontrer des gens qui se promènent aussi virtuellement au Louvre. Comme dans la vraie vie, en payant avec des vrais euros, les amis pourront acheter des gadgets de luxe virtuel pour impressionner les personnes virtuelles qu'ils rencontrent dans le "métavers". Ces projets de "métavers" produiront des quantités inimaginables de flux de données et augmenteront les besoins d’électricité en conséquence. Sans parler de la perte du dernier lieu de la sphère privé dans nos propres logements. Les activités dans le "métavers" ne diminueront pas les voyages, elles les augmenteront, comme l'ont fait les documentaires à la télévision sur la beauté des pays exotiques qui attirent toujours plus de touristes.
Supposons que le nombre de recherches fait avec des systèmes comme Chat-GPT4 égale un jour ceux fait par les moteurs de recherche comme Google et Qwant. Dans ce cas, les data-centers de Chat-GPT4 et de ses concurents consommeraient l'énergie de 20 centrales nucléaires. Détails dans le fichier Excel disponible dans le menu Télécharger. L'IA de type Chat-GPT n'augmentera que marginalement la productivité du travail, puisque les gains de productivité des écrivains et des journalistes seront compensés par le nombre croissant de vérificateurs pour éliminer les "fakes-news" et autres "vérités artificielles". Ces vérificateurs sont indispensables pour maintenir la démocratie en vie et leur travail va devenir de plus en plus compliquer avec les "deep fakes". En plus, de nombreuses professions telles que les avocats et juges utilisent leurs propres systèmes experts basés sur l'IA et n'ont donc pas besoin du contenu obsolète de Chat-GPT. Les avocats et juges ne souhaitent surtout pas les "préprompts internes" dont a besoin chat-GPT4 pour ne pas inspirer des criminels, mais qui donnent des réponses biaisées.
La miniaturisation des composants électroniques va atteindre les limites de la physique (fin de la loi de Moore). À partir d'environ 2026, l'efficacité énergétique des centres de calculs ne s'améliorera plus que marginalement et leur consommation d'électricité augmentera alors exponentiellement avec le volume des données.
Toutes ces évolutions sont en contradiction avec l'annonce des gouvernements de vouloir atteindre la neutralité carbone en 2050. Malheureusement, les décideurs politiques et économiques ignorent ce paramètre "énergie", bien qu'il soit à la base de notre civilisation industrielle. Si nous voulons éviter un réchauffement climatique supérieur à 3°C, le paramètre énergie doit devenir prioritaire dans nos choix politiques, économiques et de consommation.
Si les pays riches décident de maintenir leur consommation moyenne permanente d'énergie de 4000 à 6000 watts grâce à des investissements dépassant les 10% du PIB dans une sorte "d'économie de guerre" [5], ils n'arriveront jamais à convaincre les pays moins riches de renoncer aux énergies fossiles pour se développer, car le coût des énergies fossiles baisse si les pays riches en consomment de moins en moins. Pour décarboner leurs économies, les pays en développement ont besoin de l'aide des pays riches, car les pays riches importent des produits des pays en développement. L'Indonésie a promis de réduire les émissions de CO2 de 41% jusqu'en 2030 si le pays reçoit de l'aide des pays riches, mais seulement de 29% sans aide extérieure.
Les écoquartiers 2000 watts sont donc aussi des exemples d'une meilleure justice énergétique mondiale, des modèles pour rendre les pays riches plus crédibles.
Comment réduire la consommation d'énergie ?
A cause du réchauffement climatique, certains craignent "la fin du monde" si nous n'agissons pas vite et fort. D'autres, à cause de leur revenu modeste, craignent "les fins du mois". Pour sortir de ce dilemme entre "la fin du monde" et "les fins du mois", nous avons besoin d'un modèle pratique pour une vie économe en énergie et donc aussi économe en argent, car l'empreinte écologique correspond assez bien au pouvoir d'achat. Idéalement, ce modèle permet à tous de vivre mieux avec moins.
Plusieurs écoquartiers 2000 watts, gérés par des coopératives immobilières, ont considérablement réduit leur consommation d'énergie. Sans tenir compte de l'énergie grise [6] pour les infrastructures et les services de l’État, certains quartiers ne sont pas loin du but des 2000 watts de consommation permanente, ce qui correspond à un peu plus d'un tiers de la consommation d'énergie d'un habitant suisse en 2010. Le livre décrit les méthodes pratiques permettant à ces quartiers d'atteindre le but de la consommation d'énergie de 2000 watts. Cette réduction de la consommation d'énergie est aussi la meilleure réponse contre le réchauffement climatique, la justice sociale et une juste répartition des ressources de la planète.
Les bâtiments des écoquartiers 2000 watts consomment très peu d'énergie (10 à 12 kWh/m²/an), un cinquième de la norme française RT2012. Tout est optimisé pour une faible consommation énergétique, à commencer par le choix des matériaux de construction, l'architecture, la ventilation, l'optimisation de l'espace, etc. La consommation d'énergie du bâtiment est constamment optimisé. Le livre explique les points les plus importants permettant d'atteindre une telle efficacité énergétique.
La norme française RT2020 est presque aussi exigeante que la norme suisse Minergie-plus-eco. Construire des bâtiments respectant cette norme est vraiment difficile, surtout que mes conversations avec des entrepreneurs français du bâtiment montrent un manque terrible de formation pour respecter la norme RT2020. Pour cette raison, le livre de référence de la norme Suisse est mis à disposition dans le menu téléchargement. Ce livre bien illustré permet aux autodidactes de se former en attendant une offre adéquate de formation en France.
Réduire la consommation d'énergie d'une manière considérable implique aussi la réduction librement choisie du pouvoir d'achat individuel et la réduction de l'espace habitable individuel. Afin de maintenir un bon niveau de vie, les habitants des écoquartiers 2000 watts partagent de nombreux objets et infrastructures comme des ateliers de bricolage, un atelier de couture, des buanderies, des studios pour des invités, des salles de réunion, de fêtes et de coworking, un sauna, une bibliothèque, une salle pour des instruments de musique bruyants, mais aussi des voitures et vélos électriques appartenant à la coopérative du quartier. Le quartier facilite aussi le partage des habits et jouets entre enfants quand une famille n'en a plus besoin parce qu'un enfant a grandi. Les habits ne font pas des milliers de kilomètres avant d'arriver dans un magasin de seconde main. Ainsi, les écoquartiers 2000 watts partagent des objets et infrastructures de qualité dont on ne se sert pas souvent.
Avec le partage d'une partie des infrastructures, les appartements peuvent être plus petits, car les habitants peuvent louer des studios et espaces communs pour organiser des fêtes en famille ou entre amis. Malheureusement, l'évolution de la société va dans le mauvais sens depuis longtemps, car les surfaces habitables par habitant augmentent au même temps que la consommation d'énergie grise pour leur construction et entretien. Cette évolution annule en grande partie les gains d'efficacité énergétique des bâtiments.
Supposons que 32 familles d'un écoquartier 2000 watts partagent dans une buanderie commune 4 grandes machines professionnelles à laver le linge dont la durée de vie est de 25 ans. Comparons ces 4 machines aux 32 machines familiales, une par foyer, avec une durée de vie moyenne de 7 ans, durée moyenne en France. Produire une machine familiale consomme la moitié de l'énergie de la production d'une machine professionnelle. Ainsi, pour le seul objet de la machine à laver, l'énergie grise des habitants d'un écoquartier 2000 watts est divisée par 14 par rapport au ménage moyen en France. Avec les objets utilisés moins souvent que les machines à laver, comme les outils de bricolage et les machines à coudre, l'économie d'énergie grise est encore plus importante. Le livre développe l'ensemble des aspects des écoquartiers 2000 watts qui permettent de faire des économies d'énergie sans perdre de qualité de vie. D'autres aspects d'économie d'énergie concernent l’alimentation, les bâtiments, la mobilité, les loisirs et la vie sociale des quartiers. Ces quartiers pratiquent ainsi une décroissance librement choisie. Du point de vue du PIB les habitants sont plus pauvres, mais le sont-ils vraiment puisqu'ils ont une très bonne qualité de vie ?
Cependant, si les économies financières faites dans les domaines de l'habitation et de la mobilité quotidienne sont dépensées par ailleurs, le bilan énergétique ne s'améliore pas nécessairement. Pour cette raison, le livre mène une réflexion sur la manière de gérer le pouvoir d'attraction de l'argent, inspirée par des pratiques des écoquartiers 2000 watts les plus avancés, car l'empreinte environnementale et l'énergie utilisée sont à peu près proportionnelles à l'argent dépensé. (voir aussi "Le livre").
L'empreinte environnementale est à peu près proportionnelle à l'énergie utilisée. Voici la consommation moyenne permanente d'énergie primaire par habitant, sans les énergies grises pour créer et entretenir les infrastructures publiques :
Moyenne suisse par habitant : 7000 watts Habitation seule : 2000 watts
Ecoquartiers 2000 watts les plus avancés: 3500 watts Habitation seule : 600 watts
dont 1300 watts pour les infrastructures et services de l'Etat
En France, des coopératives d'habitants ressemblent beaucoup aux écoquartiers 2000 watts en Suisse. Si les bâtiments de ces coopératives d'habitants respectent la norme française RT2020, ce qui n'est pas facile, elles peuvent arriver aux mêmes performances énergétiques que les écoquartiers 2000 watts en Suisse. Comme les quartiers 2000 watts en Suisse, les coopératives d'habitants en France réduisent l'utilisation d'énergie grise en partageant des infrastructures et des objets. Pour continuer à avancer vers un mode de vie compatible avec la neutralité carbone, avoir un but chiffré et mesurable (2000 watts) pourrait être une source d'inspiration pour les coopératives d'habitants ou pour tout autre quartier sensibilisé à la neutralité carbone. Quelques conseils à ce sujet se trouvent dans le menu "Télécharger, rubrique Coopératives d'habitants".
Est-ce que cette société de 2000 watts créera du chômage insupportable pour la société ? Restons sur l'exemple des machines à laver. Produire un petit nombre de machines (24 fois moins dans l'exemple ci-dessus) ne justifie plus de fortement automatiser les usines, ce qui économise de l'énergie. Créer des produits de très grande qualité avec une longue durée de vie nécessite des ouvriers bien qualifiés. Donc, produire des machines de très bonne qualité en plus faible quantité économise de l'énergie et crée des emplois. Les machines de haute qualité sont certes plus chères, mais le budget est partagé puisque plusieurs ménages partagent une machine. Si de surcroît l'égalité entre humains est orientée vers la consommation d'énergie, les salaires des plus qualifiés et des moins qualifiés se rapprocheront automatiquement puisque les extravagances matérielles cesseront d'être des symboles de réussite sociale pour devenir un signe de la destruction de la planète. Cependant, les riches pourront toujours acheter des montres mécaniques de luxe fait main, car fabriquer une telle montre consomme beaucoup moins d'énergie que la production d'une Apple-Watch électronique.
une chanson de Simon et Garfunkel.
Les écoquartiers 2000 watts ne sont pas une panacée à tous les problèmes humains. Le livre décrit quelques problèmes rencontrés dans ces quartiers et des solutions mises en place. D'autres problèmes ne manqueront pas de se manifester à l'avenir. Dans ce cadre, il peut être utile de savoir qu'il existe des notions de liberté, égalité, fraternité et de justice qui rendent le vivre ensemble plus ou moins conflictuel. Le livre propose des réflexions sur ces notions, car le vivre ensemble paisible dans un voisinage ne va pas de soi, surtout si les voisins partagent objets et infrastructures. Nos sociétés individualistes vont devoir réapprendre à vivre ensemble et gérer paisiblement les conflits entre voisins. Seule l'abondance d'énergie bon marché nous permet de vivre seuls, sans se soucier de personne, seul comme « un rocher qui ne ressent aucune douleur et une île qui ne pleure jamais », selonDiscours officiels et réalité
Lors du "Sommet de la Terre" en 1992 à Rio de Janeiro, la plupart des pays du monde ont décidé promouvoir le développement durable pour lutter contre la perte de biodiversité et le dérèglement climatique. En 1997 à Kyoto au Japon, ces décisions étaient renforcées. En 2009 à Copenhague, les pays ont décidé de limiter le réchauffement climatique à 2°C et en 2015 à Paris à viser un réchauffement inférieur à 2°C.
Mais
depuis que l'humanité a décidé de réduire les émissions de CO2 en 1992, elle les a presque doublées ! En plus, la réalisation des visions et projets transhumanistes ferait considérablement augmenter les besoins en énergie. Il est donc évident que la philosophie matérialiste à tendance transhumaniste, dominante autant en Chine qu'en Occident qu'ailleurs, est incapable de se limiter elle-même avant de percuter les limites de la planète. Percuter de nombreuses limites en pleine vitesse de croissance du PIB augmentera les catastrophes météorologiques et climatiques, produira des famines avec des migrations climatiques massives et provoquera probablement une multitude de guerres et guerres civiles.Selon le scenario le plus probable du New Energy Outlook de Bloomberg (NEO 2020), le système actuel nous mènera vers un réchauffement climatique [7] de 3.3°C en l'an 2100, à comparer avec 1.1°C de réchauffement depuis 150 ans. Selon ce scénario et vu l’inertie du système climatique, le réchauffement climatique se stabilisera probablement proche de 4°C, produisant des variations météorologiques toujours plus extrêmes. Le dernier rapport du Groupe Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC) est tout aussi alarmant. Même si les Etats respectaient leurs engagements pris à la COP21, ce qui n'est pour l'instant pas le cas, la planète se réchaufferait de 3°C d'ici 2100. Une vidéo du Economist donne un aperçu des conséquences d'un tel rechauffement (en anglais). Le coût d'adaptation à une météo plus extrême sera beaucoup plus élevé [8] que le financement de la société de 2000 watts. Même un jeune humain en bonne santé ne survit pas si la température est supérieure à 34°C et l’humidité supérieure à 90 % (ou 39°C et 50 %), ce qui sera le cas dans de nombreuses métropoles situées en bordure de mer, par exemple en Indonésie, Pakistan et Inde. Un réchauffement climatique de 3°C à 4°C se réalise si nous consommons toutes les énergies fossiles exploitables et si les énergies renouvelables ne servent qu'à compenser la baisse de production de pétrole et de gaz dû à l'épuisement des réserves.
En 2020, pendant l’épidémie de la Covid-19, de nombreux Etats avaient annoncé vouloir investir en tout 16 000 milliards de dollars pour la relance économique. Dans un rapport spécial, l’AIE a proposé qu’un quart de ce montant colossal soit utilisé pour développer les énergies renouvelables. En juillet 2021, l’AIE constate que seulement 2 % des 16 000 milliards sont prévus pour les énergies renouvelables et que les émissions de CO2 atteindront probablement un nouveau record en 2023.[9] D'après les accords de Paris de 2015, les émissions de CO2 devraient baisser de 20 % jusqu'en 2025, ... et l'humanité va probablement battre un nouveau record d'émissions.
Si nous tenons compte du bilan CO2 et de l’énergie grise importée, quasiment tous les pays évoluent dans le mauvais sens, systèmes économiques capitalistes ou communistes confondus. Puisque les pays aux systèmes politiques et économiques différents évoluent dans le même sens, le problème est probablement aussi de l’ordre philosophique et anthropologique, car une forme ou une autre de la philosophie matérialiste à tendance transhumaniste est assez dominante dans tous ces pays.
Jacques Ellul écrit à ce sujet dans "Vivre et penser la liberté" (p.235): L'homme est considéré exclusivement comme consommateur-producteur. C'est aussi bien dans la doctrine matérialiste communiste que dans la pratique matérialiste américaine par exemple. Dans les deux cas, l'homme est un instrument de production. Et toute sa vie est orientée vers ce seul but. ... On ne se préoccupe pas de l'homme en tant qu'homme mais en tant que producteur et tout l'intérêt qu'on lui porte n'est pas très différent de celui qu'on porte à la meilleure machine.
Valeurs d'une société démocratique de 2000 watts
Vue la différence entre les discours officiels et la réalité, il est indispensable de réfléchir sur les valeurs humaines qui encouragent de se limiter soi-même tout en laissant de la place au progrès scientifique. L'autolimitation signifie limiter volontairement son pouvoir d'achat et l'exercice de son pouvoir sur la nature et les autres humains, ce que Jacques Ellul appelle "une éthique de la non-puissance". Réduire les relations humaines à "la volonté de puissance" (Nietzsche) est incompatible avec les liens humains nécessaires à un niveau de vie agréable dans une société de 2000 watts. En opposition à l'évolution de la société depuis un demi-siècle, nous avons besoin d'une philosophie qui priorise les relations humaines à l'augmentation du volume de biens matériels, préfère la qualité à la quantité, apprécie la sérénité plus que les sensations de la vitesse et voit dans la nature plus qu'un moyen pour s'enrichir avec un droit d'exploitation.
En regardant l'évolution des nations industrialisées depuis 1992, il est difficile de s’imaginer comment une philosophie purement matérialiste pourrait produire une société qui valorise les relations humaines plus que les objets, machines, datacenters et équipements transhumanistes. Je ne vois pas comment une philosophie délibérément matérialiste peut inciter à renoncer librement au pouvoir d'achat individuel et donc au pouvoir sur la nature et d'autres humains.
Partager des infrastructures et objets du quartier nécessite des changements de valeurs des habitants, la culture individualiste consumériste n'en est pas capable, elle est trop centrée sur ses droits, l'augmentation du pouvoir d'achat et elle a une fausse notion de la liberté. Contrairement à ce que disent des publicités, rouler avec une grosse voiture 4x4 dans un paysage sauvage n'est pas un signe de liberté mais de suivisme. Sans changement des priorités des citoyens, jamais un candidat à la présidence de la République ne sera élu s'il promet une baisse régulière du pouvoir d'achat individuel pendant les prochaines décennies. La culture individualiste consumériste a quasiment divinisé l'argent et le pouvoir d'achat. Le livre développe des pistes pour diminuer l'influence de cette divinité sans pitié.
L'ensemble des problèmes et risques mentionnés invite à une réflexion sur la devise de la République : liberté, égalité, fraternité. Trop souvent, cette devise est réduite à un slogan creux. Mais une bonne compréhension de cette devise produit les valeurs qui seront indispensables pour bien vivre dans une société de 2000 watts, sans d'abord passer par le chaos civil et la répression et l'oppression d’État.
Puisque les initiatives pratiques viennent de leurs habitants et de leurs groupes de travail, ces écoquartiers 2000 watts ont besoin de liberté créative. Ensuite, une égalité de consommation d'énergie réduit considérablement les inégalités de style de vie, une réponse originale aux inégalités croissantes. Les inégalités actuelles dans nos sociétés produisent des jalousies et des désirs mimétiques (R.Girard) qui poussent à la consommation et rendent la réduction de la consommation d'énergie impossible. La fraternité facilite le partage d'infrastructures et permet de collaborer dans divers groupes de travail et de réflexion du quartier, même entre personnes d'origine très différente. Ces écoquartiers 2000 watts sont donc en opposition à la philosophie matérialiste qui produit une société toujours plus individualiste et consumériste, et pour laquelle la vie épanouie consiste principalement en la consommation de biens ostentatoires. Cette philosophie matérialiste s'exprime par des phrases comme "ceux qui n'ont pas une Rolex à l'âge de 40 ans ont raté leur vie". Elle se répand depuis environ 50 ans et possède une compréhension très particulière de la devise de la république. Cette philosophie matérialiste ...
- réduit la liberté des humains à celle de "machines biologiques" avec un large choix devant des rayons de supermarchés et le libre arbitre à une illusion psychologique (B.F. Skinner, G. Roth, J.P. Changeux);
- considère l'égalité des humains comme une illusion issue de mythes juifs et chrétiens (Y. Harari) et préfère un égalitarisme dont l'idéal serait une égalité de clones (A. Huxley);
- considère la fraternité comme une niaiserie ou un anachronisme, puisque les relations humaines sont surtout déterminées par les rapports de forces et la "volonté de puissance" (F. Nietzsche).
La tromperie la plus efficace de notre système socio-économique est de nous faire croire que la liberté consiste à faire ce que l’on désire, sans réflexion sur les conséquences et sans considérations morales. Cela permet aux publicitaires de manipuler les envies, aux chaînes de télévision de « vendre des minutes de cerveau disponible » et aux économistes de dire que « le moral des ménages est bon » parce que les ménages achètent sans compter. Les publicitaires d'un parfum suggèrent que la liberté consiste à faire des vacances dans un désert chaud sans transpirer. Cette forme de « liberté » est une tromperie puisqu’elle est trop facilement manipulable. Cette « liberté des envies » exige une croissance illimitée de la consommation et n’est pas pérenne car elle engendrera des problèmes écologiques et sociaux toujours plus graves et pourra à terme être utilisée comme prétexte pour réduire la liberté de tous. Un rapport de l'AIE de mai 2021, dont le chapitre 5 donne un bref aperçu, montre l'importance des changements des comportements humains pour réduire la consommation et pour atteindre la neutralité carbone. Le chapitre 7 du livre propose des réflexions sur une liberté qui libère de la propagande matérialiste et des désirs mimétiques humains qui poussent à toujours plus de consommation.
Le livre propose une philosophie capable de réussir la transition vers la société post-pétrole dans une démocratie, dans l'esprit des écoquartiers 2000 watts, et guidé par une phrase du philosophe Francis Schaeffer: "Chaque société évolue lentement, mais sûrement, vers les conclusions logiques de la philosophie dominante". En plus de dénaturer la devise de la République, la philosophie matérialiste à tendance transhumaniste réduit presque tout à son utilité économique, propose de résoudre les problèmes sociaux principalement par la croissance du PIB et divise la société en une multitude d'identités communautaristes selon le principe "divide et impera", diviser pour régner (Machiavel).
Depuis bientôt 30 ans, des universités américaines enseignent des théories qui divisent la société en une multitude de communautés plus ou moins irréconciliables avec comme identité principale d'être victime des autres identités. Ces théories encouragent un narcissisme identitaire et ont des conséquences bien visibles dans leur pays d'origine. Aujourd'hui, les grands centres urbains aux États-Unis sont davantage ségrégés et fracturés qu'en 1990 [10]. Il y a 30 ans, la ségrégation était surtout ethnique, aujourd'hui elle est en plus politique (Républicains et Democrates n'habitent de moins en moins dans les mêmes quartiers), religieux et sociale. Robert Putnam, historien américain, a démontré que plus une ville américaine est multiculturelle, plus le bien commun est réduit, car chacun est alors tenté de défendre principalement son bien et celui de sa communauté. Ainsi, l'incompréhension mutuelle, la méfiance et la polarisation affective entre les communautés augmente sans cesse [11]. Robert Putnam voit le début de ce processus dans les années 1980. Depuis, les gens ont cessé d'aspirer à réparer la société et ont commencé à ne penser qu'à se "réparer" eux-mêmes et leur communauté proche. A terme, ce processus a d'autres conséquences. Plusieurs études ont montré qu’environ 70 % des étudiants américains ont davantage de traits narcissiques et moins d’empathie qu’il y a 30 ans, attitudes qui favorisent le système consumériste et la solitude [12], une solitude de consomateur ermite. L'idéologie soi-disant "éveillée" des universités américaines ressemble aux religions hyper-légalistes qui ont produit des quantités d'interdits [13]. Cependant, à la différence des religions légalistes, les administrations des universités américaines prononcent d'abord la condamnation des mal-pensants et formulent l'interdit par la suite. Une écologie inspirée par cette idéologie va inévitablement susciter du rejet et de la haine. Le livre montre les conséquences désastreuses de cette idéologie et fait des propositions concrètes d'une autre philosophie qui permet une meilleure lutte contre les abus de pouvoir de toute sorte, qui encourage la fraternité, le soutien aux plus faibles, l'amour du prochain [14].
Les écoquartiers 2000 watts les plus avancés recherchent activement une mixité culturelle, sociale, économique et générationnelle, le contraire de la ségrégation des villes "progressistes" américaines. Ces quartiers proposent un cadre qui encourage des humains d'origine diverses à vivre et travailler ensemble pour atteindre un but commun (2000 watts). Ainsi, à cause de leur mixité sociale et culturelle, les différents quartiers n'entrent ni dans une concurrence victimaire ni dans une culture d'affrontement. Le livre montre le fonctionnement, les avantages sociaux et économiques et le mode de vie de ces écoquartiers. Étant donné que les pauvres ne peuvent pas considérablement réduire leur niveau de vie sans être poussés à des émeutes de la faim, des quartiers socialement diversifiés sont beaucoup plus résilients que des villes ségrégées et fracturées. Car, soit nous réussirons la société de 2000 watts ensemble en cultivant la fraternité, soit nous échouerons ensemble avec un fort réchauffement climatique et des crises suffisamment graves pour déchirer nos sociétés démocratiques. Le préambule de la constitution suisse exprime ce besoin de cohésion sociale avec ces mots: "La force d’un peuple se mesure au bien-être du plus faible de ses membres" [15]. Pour réussir la société de 2000 watts, mieux vaut s'inspirer des écoquartiers 2000 watts que des théories universitaires qui ont prouvé tout leur pouvoir de polarisation destructive pour la société américaine.
La valeur d'un être humain devrait être intrinsèque à son humanité. Pour réussir la société de 2000 watts, un ouvrier devrait avoir la même estime aux yeux de la société qu'un PDG d'une entreprise du CAC 40, même si les deux n'ont pas le même salaire. Construire des bâtiments qui respectent la norme RT2020 est tellement difficile qu'il nécessite des ouvriers fiers de leur métier. Malheureusement, la philosophie matérialiste évalue presque tout par son utilité économique et pense que "dans des gares on rencontre des gens qui ne sont rien". Qu'on y rencontre des gens qui n'ont rien est un fait, qu'ils ne sont rien est un révélateur philosophique.
En 2020, En 1965, environ 40% des jeunes Amish ont définitivement quitté leurs communautés, ils sont moins de 5% aujourd'hui, parce qu'aujourd'hui, la vie dans nos sociétés individualistes consuméristes est probablement devenue moins attrayante. (Les jeunes Amish ont toujours été encouragés à quitter leurs communautés pour une durée de 3 mois à 2 ans afin d'expérimenter la vie dans la société et avant d’éventuellement choisir le retour dans leur communauté).
en plein débat sur l'adoption de la téléphonie 5G, le président de la République a comparé les écologistes à des Amish qui rejettent de nombreux progrès techniques et veulent un retour à la lampe à huile. Les photos en bas de page montrent que la vie dans les écoquartiers 2000 watts est agréable et ne ressemble en rien à une vie d'Amish, même si ces quartiers n'ont probablement pas plus d'utilité pour la 5G que les Amish. Au même temps, les Amish que nous avons rencontrés aux États-Unis semblent bien plus heureux dans leur mode de vie que de nombreuses personnes dans nos sociétés individualiste et consumériste.Relever les défis dans une démocratie
Les sociétés déchirées par des conflits internes violents terminent souvent dans une dictature politique. Depuis 50 ans, la concentration des pouvoirs politique et économique ne cesse d'augmenter et ce processus décrédibilise de plus en plus nos démocraties. Au même temps, les tensions entre les grands centres urbains et le reste du pays, elles aussi, ne cessent d'augmenter, un problème par ailleurs vieux de 5000 ans. Les éoliennes risquent devenir les prochaines victimes de ces tensions. Inspiré par plusieurs écoquartiers 2000 watts, le livre montre comment ces tensions entre les métropoles et le reste du pays peuvent être transformées en collaboration. Cette collaboration est même indispensable pour garantir l’alimentation dans la société post-pétrole. L'agriculture intensive, trop énergivore, n'est pas durable. En plus, d'autres formes d'agriculture peuvent stocker de grandes quantités de CO2 dans le sol. Ainsi, en plus de nourrir le pays, l'agriculture pourrait contribuer considérablement à la lutte contre le réchauffement climatique, si seulement les élites des métropoles traitaient la ruralité autrement.
Le nombre d'agriculteurs a été divisé par 4 en 40 ans. Ils ont été remplacés par des machines et techniques énergivores et polluantes, imposées aux agriculteurs par des cadres d'entreprises et d'administrations depuis des grands centres urbains. C'est une politique inapte à la transition énergétique et pousse la ruralité vers la révolte. Les nombreuses installations de production et de stockage d'énergies renouvelables ne peuvent pas être imposées à la ruralité sans une collaboration apaisée entre la ruralité et les métropoles, car il n'est pas possible de protéger toutes les éoliennes par des CRS. Plusieurs écoquartiers 2000 watts, situés dans des grands centres urbains, peuvent servir de modèles de collaboration et de sensibilisation mutuelle entre citadins et ruraux. Dans tous ces domaines, les conséquences de nos choix auront une portée historique. Le livre décrit ces problématiques et des solutions.
Une autre hypothèse du livre est qu'une démocratie semi-directe comme en Suisse fortifie la démocratie et le débat démocratique raisonnable. C'est un rempart contre les dérives démagogiques et dictatoriales. La démocratie directe sert surtout à apprendre aux citoyens à réfléchir, à s'instruire, à mener des débats raisonnables et contradictoires, à se forger une conviction en analysant une liste d'arguments "pour" et "contre" une proposition, et à se sentir concerné par le projet commun d'un pays. Les habitants ont généralement une vision à long terme, ils se soucient de la vie de leurs enfants et de leurs petits-enfants. Les politiciens ont généralement une vision à court terme qui dépasse rarement la durée de leur mandat politique. Il ne devrait donc surprendre personne que des citoyens instruits votent pour des changements qu'un gouvernement central et hors-sol n'ose pas imposer. Est-ce que la démocratie directe aurait un effet pédagogique, politique et culturel positif en France, sans devoir attendre un siècle? (En Suisse, la démocratie directe avec initiative citoyenne existe depuis 1891). Un article dans le menu "Radio" explique les principes de l'intelligence collective.
Dans l'histoire de l'humanité, en dehors de la Suisse, aucune démocratie n'a atteint l'âge de 300 ans. Sans l'aide des États-Unis, les démocraties européennes auraient disparu il y a 80 ans. Aujourd'hui, après 250 années d'existence, la démocratie américaine est gravement malade. Concernant les risques pour la démocratie, le philosophe Emmanuel Levinas nous avertissait avec ces mots "La liberté consiste à savoir que la liberté est en péril" (Totalité et Infini, Essai sur l'extériorité). C'est une raison supplémentaire qui rend utile une réflexion sur la liberté dans une société 2000-watts.
Les écoquartiers 2000 watts montrent que la transition vers la société post-pétrole est en grande partie le résultat d’un processus démocratique venant des habitants de ces quartiers et leurs nombreux groupes de discussion et de travail. Augmenter la taxe de l’essence de quelques centimes a produit la révolte des gilets jaunes et neuf mois de violence. Dans une démocratie, un pouvoir central hiérarchique n'arrivera pas à considérablement baisser le PIB tout en garantissant une bonne qualité de vie. Le livre développe aussi la thèse que les changements profonds nécessaires pour réussir la transition vers une société de 2000 watts viennent plus facilement par une démocratie semi-directe et de ses referendums que par une voie hiérarchique habituellement contestée. Ainsi, depuis 12 ans, les habitants de plusieurs grandes villes suisses ont voté pour évoluer vers la société de 2000 watt, et en 2017, les citoyens Suisses ont voté pour une loi exigeant une baisse de 43% de la consommation d'énergie jusqu'en 2035. Mais pour convaincre les citoyens, les sociétés démocratiques ont besoin d'un modèle d'un mode de vie durable qui donne envie d'être imitée. Les écoquartiers 2000 watts ont été conçus dans ce but et semblent donner raison aux chercheurs de l’École Polytechnique de Zurich à l'origine du concept. A ce jour, il existe 39 écoquartiers 2000 watts, hébergeant entre 300 et 3000 habitants et offrant à peu près autant d’emplois. Voyant la vie dans ces quartiers, les citoyens votent plus facilement pour les changements nécessaires à la création d'une société de 2000 watts. Ces changements, votés en référendum le plus souvent par des majorités confortables, ne sont pas contestés par la suite.
L’hypothèse du livre est que, face aux mêmes arguments, les Français voteraient à peu près comme les Suisses. Plusieurs argumentaires des votations sont donc disponible dans le menu "Intelligence collective". Pour aller dans le sens de la démocratie semi-directe, le gouvernement français pourrait par exemple légèrement changer une loi existante et baisser le seuil du referendum d'initiative partagée de 4,5 millions de pétitionnaires à un million et le nombre de parlementaires à 1% des membres du Parlement.
Photos d'écoquartiers 2000 watts et d'une coopérative d'habitants à Toulouse
Parking des voitures électriques appartenant à la coopérative "plus qu'un logement", avec station de charge électrique. Ces voitures peuvent être louées facilement en utilisant l'application spécifique du quartier pour téléphones portables. La même application sert aussi à surveiller sa consommation d'énergie en temps réel, de faire une réservation dans un des restaurants du quartier, de réserver et louer une salle commune, etc.
La copropriété ci-après ne fait pas partie d'un quartier 2000 watts, mais ses habitants ont pris la votation concernant la société de 2000 watts au sérieux. Ils ont écrit leur contrat avec le reste du monde sur la façade de l'immeuble. L'immeuble se trouve à l'adresse Badenerstrasse 380, 8004 Zürich. Voici la traduction du contrat (allemand "Vertrag") :
Les habitants de cet immeuble s'engagent par ce contrat à réduire leur consommation constante d'énergie à maximum 2000 watts. En cas de non-respect de cet engagement, le reste du monde possède le droit de dommages-intérêts. Lieu de Juridiction : Zürich. Droit en vigueur : droit suisse. Signé : les habitants de cet immeuble.
Notes
[1] ˄ IEA, World energy investment 2019, page 19: En 2018 en Europe, 140 milliards ont été investis dans l’ensemble du secteur de l’énergie: production d’énergies fossiles, production d’électricité avec du charbon, des renouvelables et du nucléaire. En plus, 70 milliards ont été investis dans l’amélioration de l’efficacité énergétique, comme l’isolation des bâtiments. Pour remplacer un tiers des énergies fossiles par des renouvelables ou décarbonées et créer la société de 2000 watts, il faudrait investir 400 milliards par an en Europe pendant les prochaines 30 années. Il faudrait donc multiplier les investissements actuels par trois. Entre un quart et un tiers des énergies fossiles peut être économisé par des gains d'efficience énergétique (p.ex. meilleure isolation des bâtiments) et plus d'un tiers doit être économisé par une réduction des richesses individuelles (réduction du PIB).
[2] ˄ Rte, Futurs énergétiques 2050, octobre 2021. Les différents scénarios du dernier rapport de Rte montrent qu'il faudrait diviser la consommation d'énergie par deux jusqu'en 2050, toutes sources d'énergie confondues. Rte prévoit une légère réindustrialisation de la France, mais ne tient pas assez compte du bilan négatif des énergies grises importées et exportées (voir note 6).
[3] ˄ Après avoir terminé ses calculs, les chiffres astronomiques ont poussé l'auteur à abandonner 40 années de militantisme anti-nucléaire. Le but du livre n'est donc pas de faire une description éloquente d'une théorie idéale, mais de proposer des solutions pratiques et faisables. Le livre discute différentes options nucléaires. Cependant, à cause de l'investissement initial et du coût long terme élevé des stations nucléaires, remplacer toutes les énergies fossiles par l'énergie nucléaire dans le monde n'est pas non plus la solution du problème des moyens limités de l'humanité. Pour remplacer toutes les énergies fossiles, l'humanité devrait installer et protéger plus de 100 000 minicentrales de 100 MW.
[4] ˄ Total Consumer Power Consumption Forecast, par Anders Andrae, page 20. Cette étude d’Anders Andrae corrige vers le bas une étude plus ancienne du Prof. Peter Corcoran de l’université nationale d’Ireland: Emerging Trends in Electricity Consumption for consumer ICT. Anders Andrae propose plusieurs scénarios concernant les gains d'efficience énergétique des centres de calcul. Le livre utilise des chiffres entre les deux scénarios « attendu » et « optimiste ». Les chiffres supposent que la loi de Moore sera obsolète entre 2024 et 2026, car les investissements pour les nouvelles usines de fabrication de circuits électroniques augmentent d'une manière exponentielle depuis 10 ans. Les investissements pour une nouvelle production de circuits avec des structures de 5nm atteignent environ 50 milliards en 2022 et il n'y aura probablement plus que deux ou trois entreprises dans le monde capables d'investir 120 milliards pour produire des structures de 3nm. En plus, la performance des processeurs n'augmente que peu avec la réduction des structures. Pour toutes ces raisons, l'efficacité énergétique des centres de calcul augmentera beaucoup moins vite que le volume des données à traiter. Il est donc fort probable que la consommation d'électricité augmentera selon les prévisions d'Anders Andrae.
[5] ˄ Entre 1942 et 1944, les Etats Unis ont converti toute leur économie pour produire en priorité du matériel de guerre : camions, avions, bateaux, munitions, etc. Ils n'ont plus produit ni de machines à laver ni de voitures pour les particuliers. Du fait de la perte de notre base industrielle en 2020, un "effort de guerre" aurait des conséquences similaires et sera socialement inacceptable.
[6] ˄ Energie grise : C'est l'ensemble de l'énergie nécessaire à fabriquer des objets, à commencer par l'extraction des minerais jusqu'à l'emballage de l'objet fini. La France importe beaucoup d'énergie grise car elle possède une balance commerciale négative, exporte beaucoup de services et importe des produits manufacturés. Fabriquer des objets en série par milliers consomme beaucoup plus d'énergie que leur conception dans un bureau d'études.
[7] ˄ Toutes les molécules composés d'au moins trois atomes (H2O, CO2, CH4, N2O,...) absorbent la lumière infrarouge émise par la Terre et laissent passer le reste du spectre de la lumière du Soleil. La lumière infrarouge absorbée par ces molécules, augmente leur température. Puis, elles diffusent leur chaleur dans toutes les directions, dont environ la moitié en direction de Terre. Cet effet physique s'appelle effet de serre et produit le réchauffement climatique. Cet effet a aussi pour conséquence le refroidissement des hautes couches de l’atmosphère. Ainsi, la différence des températures entre les basses et hautes couches de l’atmosphère devient plus grande, ce qui augmente les courants convectifs verticaux, et donc la puissance des tempêtes tropicales. En plus, des molécules comme le CO2 sont extrêmement stables, comme tous les oxydes, ce qui rend le processus du réchauffement climatique, à échelle humaine, quasi irréversible.
[8] ˄ Exemples: Suite aux feux de forêts en Californie des dernières années, selon la société de courtage immobilier Redfin, des biens immobiliers d'une valeur de 2000 milliards de dollars se trouvent dans des zones à risques d'incendies de forêt. Depuis les inondations de 2019, dans la seule ville texane de Houston, 220 000 maisons se trouvent dans des nouvelles zones à risques d'inondation. Dans la ville australienne Lismore, en 5 ans, il y a eu 1 sécheresse avec des feux de forêt et 2 inondations, des événements qui devaient arriver 1 fois par siècle selon les assurances. Conséquences: dans ces zones, les primes d'assurance augmentent rapidement et le prix des maisons chute. Ces pertes indirectes ne figurent pas dans les calculs des coûts des catastrophes. Calculées pour le monde entier, les pertes indirectes et directes sont déjà colossales, et elles vont augmenter exponentiellement avec chaque degré de réchauffement climatique. En 2020 aux États-Unis, les pertes directes à cause des incendies et inondations étaient de 95 milliards de dollars (TIME, 17/05/2021 p.67). Les pertes sont estimées à 2000 milliards de dollars en 2100 (The Economist, 11/06/2022, p.42). La "Global Commission on Adaptation" (GCA) écrit dans son dernier rapport qu'il faut aussi investir pour s'adapter au dérèglement climatique, par exemple investir pour rendre les infrastructures plus résilientes, développer une agriculture sans irrigation et protéger les mangroves. 1$ investi aujourd'hui évitera des pertes de 7$ en 2030.
Les pertes directes et indirectes ainsi que les investissements nécessaires à la protection contre le réchauffement climatique ont été calculés et estimés en 2006 par Nicholas Stern, chef economiste du gouvernement britanique, dans son volumineux rapport "Review on the Economics on Climate Change", London School of Economics. Le rapport est très bien documenté, ... et a été largement ignoré. Dans le quotidien Le Monde du 26 avril 2021, Nicholas Stern fait ce constat : "Sur les 77 000 articles publiés par les revues académiques les plus réputées en économie, seuls 57 concernaient le thème du changement climatique, soit une proportion de 0,074 %". L'idéologie des économistes reste enracinée au 20e siècle.
[9] ˄ IEA, Sustainable Recovery Tracker, July 2021. En plus, la demande de charbon pour produire de l'électricité augmentera considérablement.
[10] ˄ Institut Othering & Belonging de l'université Berkley Californie, "Most to Least Segregated Cities" : En 2019, 80% des villes de plus de 200 000 habitants avaient une ségrégation raciale, ethnique, sociale et politique plus importante qu'en 1990. Cette ségrégation augmente la polarisation et la fracture de la société. Stephen Menendian, directeur de l'institut universitaire, conclu: "Ce pays est toujours en piteux état".
[11] ˄ Stanford Institue for Economic Policy Research, Cross-country trends in affective polarization, jan.2020. "La polarisation affective" est une expression savante pour décrire "la haine entre communautés". En 1978, sur une échelle de 0 à 100, les Américains évaluaient à 27 leur différence de sentiments envers les membres de leur parti et ceux de l'autre parti politique. Sur cette même échelle, en 2019, si les Américains apprennent pour quel parti une personne vote, la différence de sentiment est passée à 56. Selon cette même publication, les partis politiques américains sont devenus des "conglomérats de tribus identitaires". Dans des pays comme l'Allemagne, la Norvège et la Suisse, "la polarisation affective" a baissé depuis l'an 2000.
[12] ˄ Psychology Today, Why Is Narcissism Increasing Among Young Americans?, Peter Gray, Jan 2014
[13] ˄ Le droit cannonique contient 1752 articles, le judaisme talmudique contient 613 lois, les 4 écoles juridiques de l'islam sunnite produisent des lois et de la jurisprudence en grande quantité depuis 900 ans.
[14] ˄ Ledru-Rollin du gouvernement provisoire de la France de 1848 écrits dans une circulaire adressée aux représentants des départements : "La fraternité, c’est la loi de l’amour unissant les hommes". Pour Jésus de Nazareth, l'amour du prochain est le commandement le plus important et résume toutes les 613 lois du judaïsme.
[15] ˄ Préambule de la constitution suisse : « Au nom de Dieu Tout-Puissant ! Le peuple et les cantons suisses, conscients de leur responsabilité envers la Création, résolus à renouveler leur alliance pour renforcer la liberté, la démocratie, l’indépendance et la paix dans un esprit de solidarité et d’ouverture au monde. […] La force d’un peuple se mesure au bien-être du plus faible de ses membres ».
Liste des courtes émissions radio sur des sujets de société :
- L'industrie pétrolière : coupable idéal du réchauffement climatique ?
- Réseaux sociaux et smartphones à l'origine d'une chute de la santé mentale
- Après la destruction de tout, il reste la ségrégation identitaire
- Le système de santé et la Sécurité sociale dans la société post-pétrole
- La fin de l’abondance et l’effet sur le système de santé
- L’économie mondiale entre dans l’ère du consommateur ermite
Emission radio du 18 septembre 2024
L'industrie pétrolière : coupable idéal du réchauffement climatique ?
Il y a quelque mois, Patrick Pouyanné, Président-directeur général de TotalEnergies, devait répondre à une commission d’enquête parlementaire sur sa politique pour atteindre la neutralité carbone de l’entreprise. Je lis régulièrement des articles de presse qui accusent les groupes pétroliers et gaziers d’être les responsables principaux du réchauffement climatique, pourtant, des entreprises comme TotalEnergies brûlent très peu de pétrole eux-mêmes puisqu’ils cherchent à le vendre.
En février 2022, la Russie a commencé une guerre contre l’Ukraine et suite aux sanctions occidentales contre la Russie, la Russie réduit ses livraisons de gaz vers l’Europe. Après quelques mois, le prix du gaz en Europe a été multiplié par 6 et toutes les industries grandes consommatrices de gaz ont soit arrêté la production, soit fortement augmenté les prix de leurs produits. Ainsi, le prix des engrais azotés a été multiplié par cinq et le coût de production des céréales en agriculture conventionnelle a été multiplié par trois.
C’est la logique des marchés : les prix explosent si on réduit l’offre sans réduire la demande. Avec le prix réglementé de l’énergie, pendant environ 8 mois, le citoyen français n’a pas remarqué cette flambée des prix du gaz, car l’État a payé le surcoût de l’énergie en augmentant considérablement sa dette. Si le prix de l’énergie était resté si élevé plus longtemps, soit l’État aurait fait faillite, soit l’économie serait entrée en une récession grave. Heureusement pour nous, après quelques mois, le prix du gaz a fini par baisser en Europe parce que les Américains ont fortement augmenté leur production et leurs exportations de gaz. Sans le gaz Américain, l’Europe aurait connu une hyperinflation et une crise économique grave.
Que nous enseigne ces évènements ? Ils nous montrent qu’on ne peut pas demander aux groupes pétroliers de réduire leur production si nous ne réduisent pas en même temps notre consommation. Il faut donc en priorité que notre consommation de produits pétroliers diminue.
Cependant, réduire la dépendance aux produits pétroliers n’est pas une chose facile parce que le pétrole et le gaz sont les énergies les moins chères pour de nombreuses industries et utilisations, comme la production de béton, de verre, de céramique et de produits chimiques. Les entreprises qui veulent remplacer le pétrole ou le gaz par des énergies propres ne seront plus compétitives. De plus, nous ne savons pas encore comment entretenir tout notre réseau routier sans le bitume issu des raffineries de pétrole.
La solution la plus juste pour notre industrie est la taxe carbone à la frontière de l’Union Européenne. Cette taxe entrera en videur en 2026. Les objets entrant dans l’Union Européenne seront taxés en fonction de la quantité de gaz à effet de serre émis dans les pays exportateurs. Cela rendra les produits importés plus chers et permettra à nos entreprises d’utiliser des énergies propres.
En réalité, si nous voulons lutter contre le réchauffement climatique, nous devons accepter une baisse du pouvoir d’achat dès à présent, sinon nous subirons à la fois cette baisse plus tard, quand il y aura moins de pétrole et nous subirons en plus un réchauffement climatique avec un coût d’adaptation très élevé.
Limitons donc plutôt notre train de vie dès maintenant, et investissons pour réduire la consommation d’énergies fossiles. Certes, ce n’est pas facile, car l'économie mondiale nous incite tous les jours à ne pas considérer ce qui a réellement de la valeur tout en étant gratuit, comme l'amitié, mais à dépenser notre argent pour des biens qui au fond n'ont pas de valeur.
Choisissons et soignons donc ce qui a de la valeur mais qui est gratuit : les relations humaines, la découverte de la nature, les jeux en famille et entre amis, l’ouverture aux autres. En bref, choisissons ce que Jésus nous a recommandé.
Réseaux sociaux et smartphones à l'origine d'une chute de la santé mentale
Emission radio sur YouTube "Une génération sacrifiée sur l'autel du PIB"
Plusieurs journaux et magazines ont récemment interviewé Jonathan Haidt, un chercheur en psychologie sociale. A partir de nombreuses données fiables, il a constaté un grand changement chez nos adolescents depuis l’année 2011 environ.
Depuis 2011, dans les pays développés, les téléphones portables de type smartphone sont arrivés en masse dans les lycées et collèges. En même temps, les réseaux sociaux se sont développés et ont attiré quasiment tous les adolescents.
Dans la plupart des pays anglo-saxons, également depuis 2011, le nombre d’automutilations graves chez les adolescentes a plus que doublé. Le taux de dépressions profondes chez les jeunes filles a triplé et chez les garçons les dépressions ont presque doublé, avec une augmentation continuelle depuis 2011. Cette augmentation ne se trouve pas être en corrélation avec l’évolution du taux de chômage, mais avec l’augmentation de l’utilisation des smartphones.
La pandémie du Covid-19, elle, n’a joué que très peu sur l’évolution du dépressions chez les jeunes de 10 à 16 ans.
Les chiffres parlent : les téléphones portables et les réseaux sociaux ont une influence dévastatrice sur le développement mental des jeunes. Et d’après les mesures de PISA, les résultats scolaires ont régulièrement baissé depuis 2010. Beaucoup de parents et d’enseignants constatent le problème, Jonathan Haidt nous en donne des chiffres solides.
Les chiffres montrent encore un autre aspect: l’influence des téléphones portables est plus dévastatrice chez les enfants de familles pauvres et chez les familles monoparentales que dans les familles aisées.
L’institut de sondage Gallup donne aussi un chiffre assez surprenant : Sur un échantillon de 17’000 étudiants, il montre que 60 % des étudiants regrettent l’existence des réseaux sociaux comme TikTok et Instagram, car ils sentent que ces réseaux « ne leur font pas du bien », mais ils se sentent quand-mêmes obligés d’être sur les réseaux sociaux, parce que leurs camarades de classe y sont, et parce qu’ils n’ont pas envie d’être isolés.
Après ces constats, quelles sont les recommandations de Jonathan Haidt ?
1) Pas de smartphone avant l’âge de 14 ans. Un téléphone portable simple sans aucun accès internet suffit avant l’âge de 14 ans.
2) Pas de réseaux sociaux avant l’âge de 16 ans. Regarder des vidéos sur YouTube est acceptable, mais pas la possibilité d’ouvrir un compte sur un réseau social pour y poster textes et photos.
3) Il faudrait choisir des écoles qui interdisent les téléphones portables avant l’âge de 14 ans. Cela permet d’éviter aux jeunes de subir la pression du groupe. Toujours selon les recommandations de Jonathan Haidt, les enfants doivent avoir assez d’indépendance par rapport aux adultes pour apprendre à jouer ensemble, à résoudre des petits conflits entre eux et à se réconcilier après une dispute. La réconciliation est quasiment inexistante sur les réseaux sociaux.
4) Les jeunes devraient avoir plus de temps de jeu libre au contact du monde réel et dans la nature. Il existe certes des dangers dans la nature, mais ils sont beaucoup moins grands que ceux des réseaux sociaux !
En tant que chrétiens, nous pouvons conclure que la création de Dieu a une bonne influence sur les enfants contrairement à certaines créations humaines qui sont addictives et destructrices. Des entreprises très riches continuent à s'enrichir avec cette destruction de la santé mentale de nos jeunes!
Après la déconstruction de tout, il reste la ségrégation identitaire
Ecouter l'émission du 8 mars 2024
Suite au massacres du Hamas de 1200 civils israéliens le 7 octobre 2023, nous pouvons avoir des difficultés à comprendre pourquoi tant d’étudiants de grandes universités américaines ont appelées, entre guillemets, « au génocide de Juifs », et pourquoi la présidente de l’université de Harvard ne voulait pas condamner ces appels au génocide devant une commission parlementaire. Je vais tenter d’expliquer ce qui semble incompréhensible.
Depuis 50 ans, les universités américaines ont intégré les philosophies de Michel Foucault et Jacques Dérida et ont déconstruit toutes les opposés comme vérité et mensonge, liberté et oppression, amour et haine, homme et femme, beauté et horreur, objet et sujet, et même la mort et la vie. Après avoir déconstruit tout ce qui permet de structurer les valeurs et les relations humaines, il ne leur restait plus qu’un champ de ruines. Après avoir détruit toutes les valeurs, ces universités ont construit un système matérialiste qui ne connaît que deux notions : L’identité et le pouvoir.
Ces universités ont donc divisé la société en groupes identitaires : selon des groupes raciaux et de couleur de peau, des identités de genre et des régimes alimentaires. En les combinant toutes, on trouverait plusieurs milliers d’identités. Bien sûr, l’identitarisme existe aux États Unis depuis longtemps, mais l’idéologie des universités l’a renforcé, ce qu’une étude de l’université de Californie illustre bien. Aujourd’hui, la ségrégation est plus importante dans presque toutes les grandes villes américaines qu’il y a 30 ans.3
Puisque ces universités américaines ne connaissent plus que des relations de pouvoir et de puissance, elles ont hiérarchisé les identités selon le seul critère de l’oppression. Selon cette hiérarchisation, tous les noirs, les gens de couleur, les homosexuels et les femmes sont opprimés. Si on est une femme, homosexuelle et noire, on subit trois oppressions. Cette accumulation d’oppressions est appelée « intersectionnalité ». D’après cette idéologie, la seule identité qui n’est pas opprimée parce qu’elle a le pouvoir, ce sont les hommes blancs et hétérosexuels. Ces hommes blancs seraient donc les oppresseurs de tous les autres.
Beaucoup de catégories identitaires sont arbitraires. Jusqu’en 2018, les peuples asiatiques ont été classés parmi les gens de couleur et, profitant d’une identité d’opprimés, l’accès aux universités leur été facilité. Mais parce que les étudiants d’origine asiatique avaient un très bon niveau et étaient fortement représentés dans les études supérieures, les universités ont décidé de les mettre dans la catégorie « hommes blancs » afin de rendre leur accès aux universités plus difficile. Cela a beaucoup irrité ces personnes d’origine asiatique et accélère la polarisation de la société américaine. Des étudiants asiatiques ont porté plainte contre les universités et leur plainte est devant la cour suprême.
Puisque les terroristes du Hamas sont considérés comme des gens de couleur, beaucoup d’étudiants américains les considèrent comme des opprimés, même s’ils tuent des femmes et bébés israéliens. Cela explique aussi pourquoi une présidente d’université ne voit pas de problème si ses étudiants font un appel au génocide des juifs. Les femmes et bébés tués ont ainsi reçu une identité de « blancs » et les terroristes du Hamas une identité « hommes de couleur ». C’est assez comique, puisque du point de vue racial, les juifs et arabes sont des sémites.
Pour juger les événements du 7 octobre avec davantage de discernement, il faudrait retrouver des catégories de valeurs autres que l’identité et le pouvoir. Le Dieu révélé dans la bible nous enseigne que tous les humains ont la même valeur et qu’il les aime tous. Selon le modèle de Jésus et des prophètes, les chrétiens devraient défendre tous les opprimés, sans distinction d’identité et de race. Pour les chrétiens, l’incitation au meurtre est toujours mauvaise et l’amour du prochain, quelle que soit son identité, est toujours une bonne chose, car cet amour est ancré en Dieu.
Écouter l'émission du 9 février 2024
Le système de santé et la Sécurité sociale dans la société post-pétrole
En août 2022, le président de la République a annoncé « la fin de l’abondance ». A moyen terme, le président a raison, l’Europe importe 75 % de son énergie et beaucoup de produits. Avec la baisse du pétrole disponible sur les marchés mondiaux, la richesse produite baissera, car la richesse produite dépend de l’énergie disponible. Un rapport de RTE, du Réseau de Transport d’Électricité, va dans le même sens : nous devrions apprendre à vivre avec moins. Cette baisse des moyens affectera tout le monde, y compris notre système de santé. Dans tous les domaines, nous devrions apprendre ce que Pierre Rabbi appelait « la sobriété heureuse ». Heureusement pour notre système de santé, il existe des pistes prometteuses pour mieux vivre dans une société plus sobre.
La dernière fois, j’ai parlé des études du Dr. Robert Lustig qui démontrent qu’une très forte baisse de consommation de sucre et de fructose réduirait considérablement toutes les maladies du métabolisme comme le diabète de type 2, les maladies cardio-vasculaires, le foie gras, l’obésité et certains types de démences. Ces maladies incurables ont un coût considérable pour notre sécurité sociale et pourraient être évitées. La prévention de ces maladies sera indispensable pour bien vivre dans une société plus sobre.
J’ai récemment découvert une autre étude concernant l’alimentation qui permettrait de faire d’importantes économies à la sécurité sociale. De nombreux aliments transformés et repas industriels contiennent des émulsifiants. Les émulsifiants doivent empêcher les graisses et l’eau de se séparer dans les sauces, glaces, gâteaux, entre autres. Les émulsifiants sont donc des molécules qui accrochent d’un côté une molécule de graisse et de l’autre côté de l’eau, ce qui les empêche de se séparer. Si on regarde les molécules d’émulsifiants dans le détail, surtout du côté où elles accrochent la graisse, on voit une ressemblance marquante avec les détergents. Émulsifiants et détergents accrochent les molécules de graisse de la même manière et ont donc aussi des effets semblables dans nos intestins. Avec la plupart des repas industriels, nous mangeons un peu de détergents.
Cela explique pourquoi tant de personnes sont obligées de prendre continuellement des probiotiques pour entretenir leur flore intestinale. Si on est obligé de prendre des probiotiques régulièrement, c’est qu’on mange des choses qui tuent des bactéries régulièrement, car dans des intestins en bonne santé, les bactéries s’entretiennent toutes seules.
Nous savons aussi qu’un microbiote intestinal déséquilibré peut être une cause de maladies inflammatoires, la maladie de Crohn, mais probablement aussi des maladies neuropsychiatriques comme la schizophrénie, les troubles bipolaires et la dépression chronique. Ces maladies aussi ont un coût considérable pour la sécurité sociale.
Pour les chrétiens, la prévention de maladies avec un mode de vie plus naturel est encouragée par les écritures saintes. L’apôtre Paul dit à Timothée : Dieu nous donne tout avec abondance, pour que nous en jouissions (1 Timothée 6:17). Plus nous nous approchons dans notre alimentation de ce que Dieu nous donne dans la nature, mieux c’est pour notre santé.
Ensuite, Paul écrit à l’église de Corinthe : Ne savez-vous pas ceci: votre corps est le temple du Saint-Esprit qui est en vous et que vous avez reçu de Dieu? (1 Corinthiens 6:19). Être un enfant adoptif de Dieu est un privilège qui engage à bien prendre soin de son corps. Nous pourrions ainsi vivre une sobriété heureuse et faire baisser le coût de la sécurité sociale.
La fin de l’abondance et l’effet sur le système de santé
Écouter l'émission du 12/01/2024
Nous devons l’abondance de produits et de services à l’abondante offre d’énergie fossile. Quand le coût de l’énergie a augmenté rapidement en août 2022, le président de la République a annoncé la fin de l’abondance, puisque l’abondance est liée au faible coût et à l'abondance d’énergies fossiles. Selon un rapport de RTE, du Réseau de Transport d’Électricité, nous devrions apprendre à vivre avec moitié moins d’énergie jusqu’en 2050, ce qui implique avoir sensiblement moins de moyens. Mais quel expert a pensé à l’évolution de notre système de santé dans ces conditions ?
Concernant l’évolution de l’hôpital, je perçois surtout la volonté des politiques d’investir dans l’intelligence artificielle et des techniques coûteuses et énergivores. Ce n’est pas compatible avec la « fin de l’abondance », ni avec une société dont les moyens seront en baisse.
Heureusement, il existe d’autres voies et de nombreuses bonnes solutions pour notre système de santé. Il existe un potentiel immense d’amélioration de la santé par la prévention. Je ne donne ici que deux exemples, bien étudiés et chiffrés.
Depuis un siècle, le nombre d’heures d’activités physiques par jour a été divisé par cinq puisque nous avons remplacé une grande partie du travail physique par des machines et remplacé les déplacements à pied et à vélo par la voiture. Cette sédentarité est en partie responsable des nombreuses maladies cardio-vasculaires, du diabète et même de la démence. Cependant, si les Français doublaient leur activité physique, par exemple, en marchant 10’000 pas par jour, la branche santé de la Sécu ferait une économie de 8 à 12 milliards d’euros par an.1 Faire des économies d’énergie en marchant davantage et en même temps réduire les besoins du système de santé est une voie vers la société post-pétrole.
Une deuxième solution de prévention part du constat que, depuis deux siècles, nous avons multiplié par 40 la consommation de sucre et de fructose. Le fructose se trouve dans quasiment tous les produits transformés et ultra-transformés. Les cellules de notre corps n’arrivent simplement pas à gérer ces grandes quantités de fructose et sont à l’origine de presque toutes les maladies du métabolisme comme l’obésité, le diabète et l’hypertension. Puisque nous n’avons pas de médicaments pour guérir ces maladies du métabolisme, les malades ont besoin de soins pendant toute leur vie. D’après des études du docteur Robert Lustig, 60 % des dépenses de santé aux États-Unis pourraient être économisées si les Américains divisaient par quatre la consommation de sucre, de fructose et éliminaient les produits ultra-transformés. En France, l’économie pour la sécurité sociale serait d’environ 30 %, étant donné que, depuis des années, la consommation de produits ultra-transformés augmente aussi chez nous.
D’autres méthodes de prévention et de changement du mode de vie, ainsi qu’une réduction de la bureaucratie du système de santé, permettrait les économies nécessaires pour conserver notre système de santé dans la société post-pétrole.
Pour les chrétiens, la prévention de maladies avec un mode de vie plus sain est encouragée par les écritures saintes. L’apôtre Paul dit à l’église de Corinthe : Ne savez-vous pas ceci : que votre corps est le temple du Saint-Esprit qui est en vous et que vous avez reçu de Dieu, et que vous n'êtes pas à vous-mêmes ? 2 Être un enfant de Dieu est un privilège qui engage, entre autres, à bien prendre soin de son corps.
L’économie mondiale entre dans l’ère du consommateur ermite
Écouter l'émission du 15/12/2023
Basé sur des données solides, un magazine économique mondialement respecté a publié un article sur le changement d’habitudes de consommation. Traduit en français, l’article s’intitule « L’économie mondiale change d’époque, elle entre dans l’ère du consommateur ermite ». Le journaliste considère cette évolution vers le consommateur ermite comme « socialement pathologique », surtout dans les pays riches.
De quel changement parle-t-on ? Chronologiquement, l’origine du changement des habitudes de consommation se trouve dans la pandémie du Covid-19, notamment dans les pays qui avaient de longs confinements répétés. Pendant les confinements, nous avons pris l’habitude de commander par internet et d’utiliser des « drives » pour récupérer les sacs de commissions sans rencontres humaines. Les services qui permettent du contact humain comme les théâtres, les clubs, les cinémas et les restaurants étaient fermés. Durant les confinements, on n’avait plus beaucoup de relations humaines en dehors de nos 4 murs. C’est cet isolement qui explique le terme « consommateur ermite ».
Deux ans après le début de l’épidémie, par exemple, la fréquentation des restaurants au Japon est de moitié plus basse qu’avant l’épidémie. Malgré avec cette baisse de fréquentation, les restaurants ne trouvent pas assez de personnels pour servir les clients parce que de moins en moins de personnes veulent travailler dans les métiers au contact avec du public. A la place des services avec du contact humain, les gens achètent plus d’appareils informatiques et d’équipements de logement.
Il y a 10 ans déjà, plusieurs chercheurs américains avaient constaté que l’individualisme augmentait parmi les étudiants. La pandémie a donc seulement accéléré une tendance existante.
Pour l’avenir de notre civilisation industrielle, ces observations posent deux problèmes majeurs :
Premièrement, pour lutter contre le réchauffement climatique et décarboner l’économie, il faudrait produire et consommer moins d’objets et s’offrir davantage de services impliquant un minimum de relations humaines. Prendre un repas ensemble, dans un restaurant ou ailleurs, nécessite moins d’énergie que de prendre le même repas chacun seul chez soi à la maison. D’une manière générale, ce qu’on fait ensemble est moins énergivore que les activités individualistes.
Deuxièmement, une société toujours plus individualiste perd sa cohésion sociale. Elle ne possède plus de but commun et produit des clans, chacun renfermé dans sa bulle sociale et cognitive. Les autres clans deviennent alors des ennemis, ce qui met la démocratie en péril.
L’essence du message chrétien peut contrer ces deux évolutions menaçant l’avenir de nos jeunes. L’enseignement et l’exemple de la vie de Jésus donnent priorités aux relations humaines, et au moyen de l’exercice du pardon, de la réconciliation et de l’amour du prochain, aide à avoir des relations apaisées. A la fin de leur vie, la plupart des personnes regrettent d’avoir donné trop d’importance aux choses matérielles et pas assez aux relations humaines. Jésus nous montre comment vivre dès aujourd’hui avec les bonnes priorités.
En donnant priorité aux relations humaines, le risque de s’enfermer dans une bulle tribale haineuse diminue aussi considérablement. C’est important pour la préservation de la démocratie.
Notes
1 - Rand Corporation ; The economic benefits of a more physically active population ; Voir aussi Dr. Jean-Luc Saladin
2 - Première lettre de Paul aux Corinthiens 6:19
3 - Institut Othering & Belonging de l'université Berkeley Californie, "Most to Least Segregated Cities" : En 2019, 80% des villes de plus de 200 000 habitants avaient une ségrégation raciale, ethnique, sociale et politique plus importante qu'en 1990. Cette ségrégation augmente la polarisation et la fracture de la société. Stephen Menendian, directeur de l'institut universitaire, conclu: "Ce pays est toujours en piteux état".
Liste des emissions radio sur le sujet de l'agriculture post-pétrole
- Lutte contre la triche sur les marchés carbone
- Une agriculture contre le réchauffement climatique
- Une agriculture sans énergies fossiles (2)
- Une agriculture sans énergies fossiles (1)
Ecouter l'émission du 13 nov 2024
Lutte contre la triche sur les marchés carbone
Depuis une bonne dizaine d’années, de nombreux États ont créé un marché pour encourager des entreprises à financer des projets, soit afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre, soit afin de compenser certaines de ces émissions en les stockant dans le sol. En réalité, le bois d’un arbre contient beaucoup de carbone issu de l’atmosphère. C’est la raison pour laquelle planter une forêt peut compenser le gaz à effet de serre émis par un haut fourneau en activité.
Pour atteindre ces objectifs, la loi oblige des entreprises grandes émettrices de CO2, - tels les cimenteries ou aciéries -, de payer une entreprise tierce à soit faire de la reforestation, soit de capter le méthane émis par une décharge à ciel ouvert. Dans l’Union Européenne, ce mécanisme a pour nom Système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre et ce système fonctionne comme une bourse.
Mais ce type de mécanisme donne lieu à des dérives et des tricheries qui vont entraîner une déstabilisation de tout le système. Voici deux exemples de tricheries :
- Au Brésil, le gouvernement régionale peut promettre de faire des démarches pour protéger sa forêt vierge contre les incendies, ce qui évitera des émissions de CO2. Ce projet qui évite des émissions lui permet de vendre des certificats de carbone dans le Système d'échange de quotas d'émission. Malgré les promesses d’éviter des émissions de CO2, il est possible d’encaisser de l’argent aujourd’hui et laisser brûler la forêt 10 ans plus tard.
- Autre exemple : Une entreprise peut fort bien présenter un projet de reforestation pour capter du CO2 atmosphérique, planter des arbres, vendre des certificats de stockage de carbone, encaisser l’argent, mais sans assurer la suivi. En laissant se dégrader la forêt en cas de sécheresse une partie des arbres peut dépérir et disparaître progressivement.
Le risque de triche reste important tant qu’une grande partie des quotas d’émissions consistent en des « émissions évitées », en particulier si cela se passe dans des pays à haut niveau de corruption.
Voilà pourquoi je propose une méthode de stockage de carbone dans les sols agricoles en France notamment, ce qui éviteraient les triches de la corruption. Le taux de carbone stocké dans les sols agricoles peut être mesuré avec assez de précision en analysant des échantillons de sols. On peut faire des analyses de sols une fois par an et comparer le taux de carbones d’une année sur l’autre. Si le taux de carbone organique augmente, l’agriculteur peut être rémunéré en vendant des certificats de stockage de carbone par intermédiaire d’une entreprise qui lui offre ce service.
L’agriculture dite « de conservation des sols » permet de stocker environ une tonne de carbone par an et par ha. Il faut savoir qu’une tonne de carbone correspond à 3.4 tonnes de gaz carbonique. Si l’on se réfère au prix actuel des certificats de carbone, l’agriculteur, qui utilise les bonnes méthodes, devrait recevoir environ 240 € par an et par ha. Puisque l’Union Européenne veut augmenter le prix des certificats de stockage de carbone jusqu’en 2030, dans quelques années, les agriculteurs pourraient de ce fait recevoir jusqu’à 500 € par an et par ha, si bien sûr ils utilisent la bonne méthode de l’agriculture de conservation.
Si l’on veut augmenter le taux de carbone dans les sols, il faut arrêter de labourer les champs, récolter uniquement les grains de blé et laisser la paille sur les sols, faire des rotations de cultures et semer des engrais verts en polyculture. En reconstituant ainsi l’humus, on crée une forme d’agriculture plus résistante en cas de sécheresse avec beaucoup de vertus et peu d’inconvénients.
En tant que chrétiens, nous sommes appelés à être des bons gestionnaires de la création que Dieu nous a confié, afin que nous la gardions en parfait état. Encourager les agriculteurs à enrichir les sols en choisissant les bon produits est une réponse à la confiance que Dieu nous accorde. L’agriculture conventionnelle dépend trop de l’énergie fossile bon marché et place une lourde hypothèque sur le dos de nos enfants. Le chrétien est appelé à aimer ses enfants et non pas à hypothéquer leur avenir !
Une agriculture sans énergies fossiles (première partie)
Ecouter l'émission du 20/10/2023
Pendant l’été 2023, plusieurs agriculteurs m’ont parlé de leur façon de travailler. Ceux d’entre eux qui pratiquent une agriculture conventionnelle se sentent sous pression à cause des sécheresses à répétition et à cause de l’augmentation du prix des engrais azotés. Le coût de ces engrais dépend à 80 % du prix du gaz. L’année dernière, quand le prix du gaz a été multiplié par 6, le prix des engrais azotés a été multiplié par 5. Sans ces engrais, les rendements de l’agriculture conventionnelle sont divisés en moyenne par trois.
Les monocultures de blé et de maïs ou les bicultures blé-maïs appauvrissent les terres. Au bout de 30 ans, cet appauvrissement ne peut plus être compensé par des apports d’engrais chimiques et les rendements de ces monocultures diminuent, quelque soit la quantité d’engrais chimique utilisée. Dans l’État du Tamil Nadu en Inde, dans les années 1990, la production de feuilles de thé n’a cessé de diminuer pendant dix ans malgré l’augmentation d’intrants chimiques ; les sols étaient trop dégradés, dépourvus d’humus. Des chercheurs ont alors réintroduit des vers de terre d’une espèce commune à cette région, ont laissé sur place les résidus de la taille des théiers et les ont associés à du compost. « Le résultat fut spectaculaire. Après trois ans seulement, la production de feuilles de thé a augmenté de 35 % à 240 % ».[1]
Pour la production de céréales, environ 700 millions d’hectares sont cultivés de par le monde. La conversion de ces surfaces agricoles à une agriculture durable va nécessiter des quantités inimaginables de matière organiques. Pourtant, ces matières organiques réduiraient considérablement les besoins en engrais azotés et rendraient les plantes plus résistantes en cas de sécheresse.
Dans l’Union européenne, on cultive environ 50 millions d’hectares de céréales avec la méthode conventionnelle.[2] En supposant qu’après la moisson, on laisse la paille dans les champs, cela représenterait un tiers de la matière organique nécessaire pour une culture durable de céréales. Il manquerait alors chaque année pendant 5 à 10 ans environ 600 millions de tonnes de matière organique, et où les trouver ? Dans les villes !
Parmi les personnes qui réfléchissent à l’agriculture dans la société post-pétrole, il y a quasi-unanimité pour dire que la ville doit rendre les matières organiques à la campagne. Les céréales continueront à être produites en dehors des villes, mais en échange, les villes devraient rendre aux campagnes l’azote, le potassium et le phosphore qu’elles évacuent via les égouts. Dans plusieurs communes de Bretagne et aussi à Genève, il existe déjà des quartiers dans lesquels le produit des toilettes est composté et donné aux agriculteurs. Cette façon de reconstituer l’humus rend l’agriculture également plus résiliente face aux sécheresses à répétition, qui vont encore s’aggraver avec le réchauffement climatique. Le « tout-à-l’égout » du 20e siècle, qui mélange matières organiques et produits toxiques, est donc incompatible avec un monde aux énergies fossiles rares et coûteuses. Le problème est également partiellement d’ordre psychologique et philosophique.
Pour réaliser plus facilement cette transition de l’agriculture, les humains, et en particulier les jeunes générations, devraient être à l’aise avec leur corps, la nature et le monde agricole. Il faudrait peut-être d’abord se réconcilier avec le Créateur afin de changer notre vision de la création, de la nature, de l’agriculture et des processus biologiques de notre propre corps. Le livre "Pratiquement durable" y consacre un chapitre.
Une agriculture sans énergies fossiles (deuxième partie)
Ecouter l'émission du 25/04/2023
Un siècle d'énergie bon marché a rendu l'agriculture très énergivore et très « économe » en main-d'œuvre. Depuis 70 ans, cette agriculture économe en main-d'œuvre a dépeuplé les zones rurales et peuplé les métropoles.
Mais si, en 2050, nous devons vivre avec 2 à 3 fois moins d’énergie afin de réduire considérablement notre contribution au réchauffement de la planète, l’agriculture va devoir changer profondément, et pas seulement à cause des sécheresses à répétition.
La production d'engrais chimiques et produits phytosanitaires est très énergivore. Quand, l’été dernier, le prix du gaz naturel a été multiplié par 6, le prix des engrais azotés a été multiplié par 5, car leur production consomme d’énormes quantités de gaz. Si la politique agricole ne change pas, sans énergies fossiles bon marché, les prix de l’alimentation vont fortement augmenter, ce qui va être difficile pour les personnes aux revenus modestes. Cela risque même de provoquer des émeutes de la faim.
Mais heureusement, il existe des solutions pratiques et durables. Plusieurs amis agriculteurs avec des grandes exploitations ont des très bons rendements, quasiment sans engrais chimiques. Ils pratiquent soit une des formes de l’agriculture biologique, soit l’agriculture de conservation. Pour remplacer les engrais chimiques énergivores, ces formes d’agriculture ont besoin de très grandes quantités de matière organique, par exemple le fumier des animaux ou des résidus de plantes comme la paille.
Mais que faire avec les 50 millions d’hectares de céréales conventionnelles de l’Union européenne ? Pour les transformer en agriculture de conservation, en plus des engrais verts, il nous faudrait 600 millions de tonnes de matière organique issues des villes. Malheureusement, les boues des stations d’épuration sont beaucoup trop polluées par des métaux lourds, des médicaments et des poussières de pneus des voitures. Aujourd’hui, les matières organiques des villes sont perdues, mais il existe d’autres solutions locales.
Plusieurs quartiers en Bretagne, à Genève et ailleurs montrent le chemin. Soit les habitations possèdent des toilettes sèches, soit le quartier possède son propre système d’assainissement biologique avec récupération de l’eau de pluie. Une coopérative d'habitants à Genève, regroupant 50 logements, a investi dans un tel système et a aussi fait un contrat avec un agriculteur. L’agriculteur apporte quelques bottes de paille 2 fois par an et récupère du compost pour ces champs, économisant ainsi des engrais chimiques. Les habitants du quartier n’ont plus besoin de payer la taxe d’assainissement et divisent la facture d’eau par 2 ou par 3. L’investissement est amorti en moins de 5 ans et devrait être intéressant pour la plupart des lotissements et immeubles d’habitation. En ville, ce type de système d’assainissement biologique peut être placé sous un parking.
En parlant des problèmes et solutions pour l’agriculture depuis des années, je rencontre souvent la même réaction : mes interlocuteurs trouvent l’idée de toilette sèche ou de système d’assainissement biologique dans le quartier « dégoûtant », même si ces systèmes ne dégagent pas d’odeurs et sont hygiéniques. Ces sentiments montrent que les humains ne sont pas à l’aise avec une partie de leur corps, contrairement à tous les autres mammifères de la planète. Les humoristes exploitent le même malaise avec une partie du corps en faisant des blagues sur la sexualité. Rien de plus facile pour faire rire leur public.
Les auteurs bibliques expliquent cette particularité humaine par leur séparation de Dieu. Adam et Eve voulaient être autonome, indépendant, autonome comme Dieu (nomos veut dire loi en grec). Ainsi, ils ont perdu leur lien spirituel avec Dieu et sont devenus mal à l’aise aussi bien avec leur nudité et qu'avec leur esprit. L’analyse des auteurs bibliques sur l’état des humains est bonne, leur proposition du remède aussi. Un chapitre du livre "Pratiquement durable" parle de ces sujets.
Une agriculture contre le réchauffement climatique
Ecouter l'émissions du 28/09/2023
Ces dernières semaines, j’ai lu plusieurs articles extrêmement élogieux dans des grands journaux concernant de nouvelles machines, qui extraient des gaz à effet de serre de l’atmosphère et le stockent en forme liquide dans le sous-sol. Deux usines pilotes, l’une en Suisse et l’autre en Islande, sont devenues des lieux de pèlerinage pour des technophiles, qui croient que les problèmes du réchauffement climatique peuvent être résolus par la technique seule. Aucun des articles élogieux de ces machines n’a mentionné leur bilan énergétique. Mais ces usines consomment 1000 kWh d’électricité pour sortir 1 tonne de gaz carbonique de l’atmosphère [3]. Si on voulait extraire de l’atmosphère tout le CO2 que le énergies fossiles émettent, ces usines consommeraient une fois et demie l’électricité produite dans le monde aujourd’hui. C’est totalement irréaliste. J’ai parfois l’impression que ni les journalistes, ni les économistes se préoccupent de la réalité et des lois de la physique.
Pourtant, il existe d’autres solutions pour sortir le CO2 de l’atmosphère et de le remettre dans le sol. Lors de la conférence sur le climat de Paris en 2015, les gouvernements ont décidé de promouvoir une forme d’agriculture qui permet de stocker des millions de tonnes de CO2 dans le sol. En plus, cette forme d’agriculture permet d’économiser de l’énergie. L’initiative de la COP21 de Paris s’appelle 4 pour 1000, car elle permet de remettre 0.4 % de carbone dans le sol. La méthode agricole s’appelle « agriculture de conservation ». Cette technique agricole ne laboure plus et économise donc le carburant des tracteurs. Elle laisse un maximum de matière organique sur les champs. Elle récolte le blé mais laisse la paille sur les champs. La terre n’est jamais nue non plus, car après la récolte, on sème des plantes qui captent l’azote qu’on appelle « engrais vert ». En plus, ces plantes permettent d’enrichir le sol.
En utilisant cette méthode, plusieurs de mes amis agriculteurs ont de très bons rendements, mais avec très peu d’engrais chimiques. En effet, produire des engrais chimiques azotés nécessite beaucoup d’énergie, l’agriculture de conservation permet donc d’importantes économies d’énergie.
Voilà donc deux solutions pour faire quelque chose contre le réchauffement climatique, l’une très coûteuse et énergivore, l’autre quasiment gratuite avec un bilan énergétique très positif.
Pourquoi les journalistes, les politiciens et les économistes ne s’intéressent-ils pas à cette forme d’agriculture et s’émerveillent-ils devant des solutions technologiques irréalistes ? C’est difficile à comprendre, car déjà il y a 8 ans, la conférence de Paris a reconnu l’utilité de cette agriculture de conservation ! Je n’ai qu’une explication pour cet aveuglement : nos élites ont perdu le contact avec la nature, avec l’agriculture et avec la réalité physique.
Actuellement, le prix de la tonne de CO2 sur le marché européen du stockage de carbone est environ 100 € la tonne [4]. L’agriculture de conservation peut stocker jusqu’à une tonne de carbone par ha et par an, ce qui équivaut 4 tonnes de CO2. Si on permettait aux agriculteurs de participer à ce marché, ils pourraient recevoir 400€ par an et par ha pour le stockage de carbone dans le sol, ce qui financerait le coût de la conversion vers l’agriculture de conservation. Tout le monde serait gagnant : Le climat, la transition énergétique, la qualité des aliments et la qualité du sol qui résisterait mieux aux sécheresses.
D’après les textes bibliques, l’être humain a été créé par Dieu pour vivre dans un jardin pour le cultiver. Mais Caïn, le premier meurtrier, et Nimrod, le premier guerrier, ont préféré construire des villes et vivre loin de Dieu et de la nature. Si nous voulons réconcilier les grands centres urbains et la ruralité d’une manière générale, il faudrait peut-être d’abord se réconcilier avec Dieu.
Notes
[1] Daniel Nahon, Sauvons l’agriculture !, page 134
[2] Source : USDA pour 2018/2019
[3] MCC Berlin, Filtering a tonne of CO2 from the air burns a thousand kilowatt-hours of energy ; 29.10.2019
[4] https://economic-research.bnpparibas.com/html/fr-FR/prix-carbone-europeen-haut-01/03/2023,48320
Émissions et conférences sur l'Intelligence Artificielle (IA)
- Conférence sur l'Intelligence Artificielle et Humaine (IA) (YouTube)
- Conférence sur l'IA et les risques du transhumanisme pour la démocratie, dignité et liberté humaine (YouTube)
- Chat-GPT, une formidable avancée technique ou la fin de l’humanité ?
- Intelligence artificielle et l’absence de notion de vérité
Intelligence artificielle et l’absence de notion de vérité
Écouter l'émission du 17 novembre 2023
Depuis avril 2023, j’ai lu et entendu plusieurs fois que l’Intelligence Artificielle n’a pas de contact avec la vérité, mais personne n’a expliqué d’où vient cette absence de la notion de vérité. Cette absence d’explications vient peut-être de la gène ressentie quand on parle de la vérité dans la culture postmoderne, puisque du point de vue philosophique, notre culture ne produit que des déconstructions et ne construit plus rien.
Pour commencer, il faut comparer la manière d’apprendre d’une machine et celle d’un humain. L’humain possède un corps avec une multitude de capteurs lui permettant de vivre dans une réalité physique complexe. Si une maman dit à son enfant « ne touche pas la casserole, elle est chaude », l’enfant peut avoir une expérience physique de la chaleur et faire un lien entre les mots de sa maman et la réalité physique.
Et pourquoi les bébés de 9 à 18 mois, assis sur leurs chaises hautes, laissent régulièrement tomber leurs cuillères ? Le bébé apprend ainsi que le monde physique fonctionne d’une manière régulière et prévisible. Voir une cuillère monter au plafond tout seul serait une expérience extrêmement dé-sécurisante, par contre, la régularité de la loi de la gravité est rassurante. La notion de gravité vient d’une expérience aux multiples facettes et cesse d’être un simple mot.Pour l’intelligence artificielle, la gravité est un mot, suivi ou précédé par d’autres mots, dont l’occurrence est plus ou moins probable. L’intelligence artificielle ne distingue pas entre la loi de la gravité et la gravité d’une maladie. Pour cette intelligence, il est uniquement plus probable que le mot « loi » précède le mot de gravité et que le mot « maladie » lui succède. L’intelligence artificielle calcule la probabilité des séquences de mots en analysant tous les textes de l’internet. Contrairement aux humains qui ont une vraie expérience de la loi de la gravité et de la gravité de situations, l’intelligence des ordinateurs ne comprend rien.
Puisque l’intelligence artificielle n’a aucune expérience de la réalité, elle produit des phrases plus ou moins probables sans remarquer que certaines de ses phrases sont considérées comme des « hallucinations ». Seuls les humains sont capables de distinguer entre réalité et hallucination, parce qu’ils ont un corps qui leur donne d’innombrables informations sur la réalité et qu’ils ont un esprit pour les analyser. Cette expérience de la réalité permet donc de vérifier chaque affirmation en la comparant à la réalité.
Les transhumanistes, qui font l’éloge illimité de l’intelligence des ordinateurs, ont une philosophie qui réduit les humains à des machines biologiques programmables et ils réduisent en même temps la vérité à une convention sociale. Les transhumanistes défendent toutes les nouvelles technologies qui rendent les jeunes de plus en plus dépendants des réalités virtuelles, par exemple à travers les téléphones portables et les réseaux sociaux. En réduisant autant que possible l’expérience de la réalité physique et de la nature, les humains finiront, espèrent-ils, par s’identifier eux-mêmes à une machine biologique programmable dont le but principal est la consommation d’objets et de services.
Il me paraît donc important que les chrétiens comprennent les enjeux philosophiques de l’intelligence artificielle. Il faudrait donner à nos jeunes une large expérience de la diversité et la beauté de la nature et l’envie de l’explorer avec d’autres humains. C’est d’autant plus nécessaire que certains types d’intelligence artificielle deviendront des usines à mensonges ou fake news qui seront difficiles à identifier comme tels.
Une bonne expérience de la réalité, de la nature, de la vie en groupe ou en famille avec des relations de confiance sont nécessaires pour ne pas se laisser tromper par tout ce que produira l’intelligence artificielle. Rechercher et pratiquer l’enseignement et l’exemple de Jésus-Christ nous encourage à remettre la priorité sur la relation avec la création, les humains et avec Dieu. C’est la meilleure façon de résister aux fausses promesses des transhumanistes et leur éloge des ordinateurs et des data-centers.
Chat-GPT, une formidable avancée technique ou la fin de l’humanité ?
Écouter l'émission du 23 mai 2023
Depuis trois mois, les médias parlent souvent de l’intelligence artificielle et en particulier d’un système qui est capable de mener des conversations avec les humains. Ce système s’appelle chat-GPT. Je l’ai testé et les textes produits par le système sont impressionnants.
Sur une chaîne d’information française, un ancien ministre et d’autres personnalités ont récemment fait l’éloge de cette révolution technologique. D’après ces personnalités, cette intelligence artificielle va totalement bouleverser nos sociétés et notre façon de travailler. Elle va fortement augmenter la productivité de certains métiers et détruire au passage des millions d’emplois.
J’ai fait quelques recherches, en particulier concernant ses besoins en énergie.
Si on pose des questions générales au système, les réponses sont pertinentes et justes. Si on pose des questions sur des sujets controversés, la machine produit des réponses typiques du « politiquement correct » de la Californie. La machine a, par exemple, censuré une chanson d’un célèbre chansonnier suisse qui se trouve sur YouTube en 4 versions différentes. Cette chanson censurée, le compositeur l’a créé pendant des vacances en Tunisie en 1966. Elle parle d’un jeune berger qui tombe amoureux d’une fille d’un riche marchand de chameaux. Le berger n’a pas assez d’argent pour payer la dot et choisit finalement une fille moins riche. Cette chanson est politiquement incorrecte parce qu’elle montre un aspect pas positif de la culture islamique.
La question sur l’origine du commerce d’esclaves dans le monde islamique a aussi produit une réponse politiquement correcte, mais factuellement trompeur. Pourtant, la réponse juste se trouve, entre autres, dans un livre très documenté sur l’histoire de l’église d’Égypte (The history of the church of Egypt). Le livre a été publié en 1850 et est gratuitement disponible sur internet. ChatGPT-4 connait bien sûr la bonne réponse, mais les filtres les ont écartées. Celui qui maitrisera ces technologies maitrisera de plus en plus les discours.
Concernant la consommation d’énergie, il faut connaître quelques détails techniques. Pour obtenir ses résultats, une machine simule un réseau de 2 milliards de neurones artificiels avec 1500 milliards de paramètres. Pour les faire fonctionner, la machine utilise plus que 100’000 processeurs graphiques très performants. J’ai alors calculé la consommation d’énergie si, à l’avenir, toutes les recherches internet se faisaient avec des machines comme le GPT-4. Les centres de calcul de cette intelligence artificielle consommeront alors l’électricité produite par 3 centrales nucléaires. Cela fait beaucoup d'énergie pour une seule application.
Qu’est-ce que cela signifie pour l’avenir de nos enfants ?
Premièrement, le potentiel de manipulation est tout aussi impressionnant que les performances techniques. Puisque notre civilisation a déconstruit la notion de vérité depuis 40 ans, ces machines vont achever la déconstruction de la vérité et de la réalité, ce qui est une des caractéristiques des gouvernements totalitaires.
Deuxièmement, dans le domaine de l’informatique et de l’internet, toutes les nouvelles technologies augmentent considérablement les besoins en énergie. Or, pour limiter le réchauffement climatique, nous devrions considérablement diminuer la consommation d’énergie, non pas l’augmenter. Dans les prochaines 30 années, nous devrions diviser notre consommation d’énergie par 2.5, et ne pas faire la promotion de nouvelles technologies très énergivores. La planète évolue actuellement vers un réchauffement climatique entre 3° et 4°C à l’horizon de 2100, ce qui rendrait une partie très peuplée de la planète invivable pendant plusieurs mois par an. Si nous aimons nos petits-enfants, nous devrions réviser nos priorités et refuser les nouvelles technologies énergivores, qui sont en plus un danger pour le débat démocratique raisonnable. Plus que jamais, nous avons besoin d’une culture de la vérité qui s’oppose à notre culture de puissance et de la manipulation par les technologies.
Projet d'un écoquartier à Lunéville - Chanteheux
Moto: Confort optimal avec une empreinte environnementale et énergétique minimale
Photos du terrain en bas de page
Un groupe de plusieurs foyers souhaite créer une coopérative d'habitants dans la région de Lunéville. Dans la mesure du possible, cette coopérative d'habitants devrait poursuivre les buts des écoquartiers 2000 watts, qui ont un faible impact environnemental et consomment très peu d'énergie. Pour l'instant, cette page une collection d'idées, les discussions concernant le cahier des charges ne sont pas encore terminées.
Un des terrains disponibles de 12'000 m², à l'intérieur de l'agglomération de Lunéville, se trouve à 10 ou 15 minutes à pied d'une école maternelle, d'une école primaire, d'un Collège et Lycée, d'une boulangerie, pharmacie, d'un centre de santé et d'un supermarché. La gare SNCF, le théâtre et une école de danse se trouvent à 10 minutes à vélo, un peu moins avec un vélo électrique. Un arrêt de Bus se trouve à 5 minutes à pied.
Sur un de ces terrains, il y a de la place pour quatre bâtiments proposant 2 à 4 logements chacun. Ces bâtiments seront reliés par des infrastructures communes. Les bâtiments doivent respecter la norme RT2020 (chauffage < 15 kWh/m²/an). Les habitations privées seront plus petites que la moyenne française, mais elles devraient avoir accès à des infrastructures communes, dont on ne se sert que rarement : ateliers de bricolage, atelier de couture, bibliothèque, salle de fête avec cuisine, studios pour visiteurs, etc. Le quartier aura aussi un parc pour les habitants et un grand terrain de jeu pour les enfants.
À la place de garages souterrains construits en béton, nous pourrions construire un grand abri de voiture en structure bois et couvert de panneaux photovoltaïques en autoconsommation. Sous l'abri de voitures, on pourrait installer deux bornes de charge pour voitures électriques. (voir une conférence qui explique pourquoi, à moyen terme, le prix des voitures électriques va fortement augmenter).
Si un membre de la coopérative souhaitait s'essayer dans la restauration et si tous les autres membres de la coopérative d'habitants sont d'accord, une partie des infrastructures communes pourrait servir de restaurant 1 fois par mois jusqu'à 3 fois par semaine. L'idée s'inspire des personnes un peu partout en France qui reçoivent chez eux à la maison des visiteurs pour un repas payant. Puisque le but premier consiste à baisser la consommation d'énergie, cuisiner des repas pour plusieurs personnes dans un restaurant consomme moins d'énergie que de cuisiner chacun seul dans sa maison.
Idéalement, en fonction des personnes intéressées, une grande partie des terrains sera utilisée pour faire du maraichage, dont la microferme du Bec-Hellouin peut servir d'inspiration. Sous notre terrain disponible se trouve aussi une nappe phréatique avec un débit d'eau important. Même en année de sécheresse, un puits profond de 4 mètres peut fournir plus de 8m3 d'eau à l'heure en permanence.
Le terrain de maraîchage peut être acheté, loué à l'actuel propriétaire ou loué à la coopérative d'habitants. La coopérative d'habitants pourrait proposer un lieu de vente pour les maraichers s'ils le souhaitent. Les maraichers devraient travailler autonomes, mais pourraient éventuellement faire appel aux habitants de la coopérative pendant les périodes à forte intensité de travail. Nous pouvons nous inspirer d'un modèle d'une coopérative d'habitants en Suisse qui travaille avec des maraichers professionnels. Dans cette coopérative, les habitants aident au minimum 5 petites journées par an et obtiennent les légumes à un prix un peu plus avantageux par rapport aux autres clients. Ce projet comme tout le reste sera discuté et adapté par les futurs membres de la coopérative d'habitants et par les maraîchers.
Puisque l'écoquartier devrait servir de modèle pour "bien vivre avec moins" dans beaucoup de domaines, la salle de réunion et de fête peut aussi servir pour proposer des formations, inspiré par la microferme du Bec Helloin.
Concernant le financement de la coopérative d'habitants, nous nous laissons inspirer par la coopérative d'habitants AbriCoop à Toulouse, adaptée à nos besoins et moyens, et encadrée par la loi Allure de 2014.
Puisque la consommation d'énergie est à peu près proportionnelle aux dépenses en argent, les frais de fonctionnement devraient être aussi faibles que possible, avec une partie de l'énergie produite sur place. Des abonnements de fibre-optique pourraient aussi être partagés en installant un serveur pour le quartier, car le débit d'une fibre optique est largement surdimensionné pour un seul foyer.
Une autre idée concerne la gestion de l'eau, qui pourrait être optimisée pour réduire les frais de fonctionnement. Nous souhaitons aussi réaliser un système d'assainissement des eaux usées et de récupération de l'eau de pluie sur place, tel qu'il a été réalisé par une coopérative à Genève (EQUILIBRE_Soubeyran.pdf765.75 Ko). La coopérative à Genève récupère l'eau de pluie et les matières organiques des habitations, qui sont utilisées dans l'agriculture après un deuxième compostage. L'agriculteur peut ainsi réduire les d'engrais chimiques. La fabrication des engrais azotés pour l'agriculture conventionnelle consomme beaucoup trop d'énergie (gaz naturel). Le système d'assainissement permet aussi de diviser la facture d'eau des habitants par deux ou trois. Notre Communauté de Communes a aussi manifesté un intérêt pour ce système d'assainissement. Le système a été conçu par l'École Polytechnique de Lausanne.
Bilan carbone théorique du projet
Par simple curiosité et sans influence sur le projet définitif, le bilan carbone du mode de vie d'un tel quartier a été simulé sur le site de l'ADEME. Nous avons fait les suppositions suivantes :
- Mobilité : 1 voiture électrique de type Zoé par foyer (8 voitures pour 8 foyers). Chaque personne parcourt 5000 km en voiture par an en moyenne. Si une personne ne fait que 1000 km, une autre peut en faire 9000 km. Les voitures sont chargées le jour par les panneaux solaires du quartier afin d'éviter les pertes dû au stockage de l'électricité dans un système hydroélectrique. Voyages en train : 2000 km par an.
- 1 vélo électrique par personne. Chaque personne parcourt 800 km par an.
- Alimentation de saison et locale avec peu de viande.
- Consommation : Très peu de déchets et très peu d'achats d'appareils et équipements. Les équipements et machines de très grande qualité sont achetés par la coopérative. Compostage des déchets organiques.
- Résultat : 1,8 tonne de CO2 par an et par personne, mais sans tenir compte des services publics (1,6 t / an). Ce mode de vie peut être considéré comme durable si l'État, lui aussi, fait un effort. En plus, le mix énergétique des pays exportateurs vers la France doit davantage être décarboné pour arriver à 2 t de CO2, services publics compris.
- Comparaison : En moyenne, un Français émet 9 tonnes de CO2 par an (INSEE), un Allemand 11 t, un Suisse 12 t, un Américain 15 t, un Africain hors Afrique du Sud 1,5 t (statistica).
Puisque l'empreinte carbone et l'énergie consommée sont en corrélation avec le coût de la vie, ce mode de vie convient aussi à des personnes avec des faibles revenus.
Nous commencerons à travailler concrètement sur le cahier des charges de ce projet dès que 8 foyers ont manifesté leur intérêt. Nous cherchons donc des personnes intéressées par ce type de coopérative d'habitants poursuivant les buts des écoquartiers 2000 watts. Curieux ou intéressés, vous pouvez nous écrire par le menu Contact de ce site internet.
Article paru dans l'Est Républicain sur ce projet: ER_quartier_2000-watts_luneville-21-jan-2023467.90 Ko
Article paru dans l'Est Républicain le 15 octobre 2022 : Conférence sur les limites de la croissance verte au château de Lunéville et projet d'écoquartier459.35 Ko
Article paru dans l'Est Républicain le 9 août 2022: Ecoquartier 2000 watts à Lunéville ou Chanteheux516.93 Ko
Contenu de cette page:
1. Culture de débat démocratique pour réussir le changement
3. Les limites d'un gouvernement jupitérien
Cette page propose une introduction à la démocratie semi-directe. En France, elle était promue en 1793 par Nicolas de Condorcet, mathématicien et secrétaire de l’Assemblée nationale législative. Cette forme de la démocratie est mise en pratique dans les cantons suisses depuis le XIVe siècle et dans la fédération helvétique depuis 1850 (initiative citoyenne depuis 1891).
"Jamais il n’a existé de constitution où l’égalité ait été si entière, où le peuple ait conservé ses droits dans une si grande étendue ; […] elle fait exercer par le peuple même des droits qu’on avait crus jusqu’ici devoir être délégués, elle fait de tous les républicains de France autant de législateurs actifs votant individuellement la loi ou la révocation de la loi. C’est la Constitution la plus démocratique qui puisse être donnée à une grande nation". Frank Alengry; Condorcet, guide de la Révolution française; Slatkine Reprints, Genève, 1971
« Le souverain, n’ayant d’autre force que la puissance législative, n’agit que par des lois ; et les lois n’étant que des actes authentiques de la volonté générale, le souverain ne saurait agir que quand le peuple est assemblé. Le peuple assemblé, dira-t-on, quelle chimère ! C’est une chimère aujourd’hui ; mais ce n’en était pas une il y a deux mille ans. Les hommes ont-ils changé de nature ? » Jean-Jacques Rousseau; Du Contrat social, Livre III, Chapitre XII
Culture de débat démocratique pour réussir le changement
De nombreuses publications montrent comment une démocratie peut mourir, par exemple Steven Levitsky & Daniel Ziblatt dans "How Democracies Die". Réduire le PIB pour atteindre la neutralité carbone ne se fera pas contre l'avis du peuple sans crises graves. Soit le PIB sera réduit sans perte de qualité de vie par des moyens démocratiques, soit le PIB se réduira par des crises graves, contre l'avis de tous. Le PIB peut être réduit comme dans les quartiers 2000 watts, ou par une guerre civile comme en Syrie, ou suite à un réchauffement climatique de 3° à 4°C. Un tel réchauffement climatique se réalise si nous consommons toutes les énergies fossiles exploitables et si les énergies renouvelables ne servent qu'à compenser la baisse de production du pétrole et du gaz dû à l'épuisement des réserves. Réussir la neutralité carbone dans une démocratie sans perte de qualité de vie est donc un défi non négligeable.
Les publicités sur tous les médias nous rappellent 20 fois par jour que nous sommes des consommateurs. En France, une fois tous les deux ans, une élection nous rappelle que nous sommes aussi des citoyens. Il est urgent de changer ce rapport 1 sur 10 000 si nous voulons réussir la transition vers la société poste-pétrole ensemble. La démocratie a besoin de citoyens qui participent et qui s’engagent. La mentalité individualiste consumériste et râleuse ne produit pas de démocratie durable, elle favorise les démagogues.
En France, la Convention Citoyenne a montré que des simples citoyens peuvent comprendre des données complexes et faire des propositions concrètes pour réduire l'impact des humains sur l'environnement et le climat. Cependant, il n'est pas recommandé de proposer un référendum au sujet des 149 points de cette convention. Les humains ne sont pas capables de raisonnablement débattre tous les arguments pour et contre 149 points différents lors d'un seul référendum. Il faudrait en organiser 5 référendums différents et regrouper les propositions par thèmes. Chaque point de chaque référendum devrait d'abord être débattu au parlement et un résumé des arguments majoritaires au parlement devrait être envoyé aux électeurs, au même temps que les arguments de la convention citoyenne et du gouvernement. Ainsi, chaque électeur pourrait étudier les trois argumentaires avant d'aller voter.
En Suisse, les citoyens de plusieurs villes ont voté pour mettre en place la société de 2000 watts. En 2017, les Suisses ont aussi voté pour une nouvelle "loi énergie" qui exige, entre autres, des économies d'énergie de 43% jusqu'en 2035 pour l'ensemble du pays. Ces exemples montrent que la population est prête à accepter des changements importants si elle est consultée ou si l'initiative vient d'elle-même. Par contre, des changements imposés par une hiérarchie distante et méprisante sont souvent combattus, par exemple par des gilets jaunes. Si la "démocratie directe" était déplacée de la rue vers les urnes, les manifestations violentes ne seraient plus récompensées.
Dans l'histoire de l'humanité, aucune démocratie n'a duré plus de 300 ans avant de retomber dans la tyrannie. Sans l'aide des États-Unis et d'autres pays extérieurs à l'Europe, les démocraties européennes auraient disparu il y a 80 ans. Aujourd'hui, la démocratie américaine est très malade.
La démocratie directe en Suisse a une longue histoire. Les communautés montagnardes de la Suisse centrale, régies par des assemblées populaires, avaient développé dès le début du XIVe siècle des moyens de dialogue démocratique, garant de leur indépendance contre l'empire des Habsbourg autrichien. Un peu plus tard, des villes comme Lucerne et Zurich les ont imités. Aucune autre forme de démocratie n'a duré aussi longtemps.
Intelligence collective
Différents chercheurs ont montré l’importance de l’intelligence collective pour les scientifiques, par exemple Isabell Stengers dans son livre « Une autre science est possible ! ». Dans son livre "The Wisdom of Crowds" (La sagesse des foules), James Surowiecki montre les avantages de l'intelligence collective pour les entreprises, la recherche, les marchés financiers et les démocraties [1]. L'intelligence collective donne des meilleurs résultats que l'intelligence individuelle jupitérienne, si elle remplit quatre conditions :
- la diversité d'opinions (chacun doit avoir des informations personnelles, même s'il ne s'agit que d'une interprétation excentrique des faits connus),
- l'indépendance (les opinions des gens ne sont pas déterminées par les opinions de ceux qui les entourent),
- la décentralisation (les gens peuvent se spécialiser et s'appuyer sur les connaissances locales)
- l'agrégation (il existe un mécanisme pour transformer les jugements personnels en une décision collective).
Le site de paris Polymarket permettait à tout le monde de parier sur l'élection présidentielle américaine, en choisissant entre D. Trump et K. Harris. Les prévisions de The Economist sont généralement parmi les plus fiables, mais la population participante au site de paris politiques Polymarket a prédit le résultat de l'élection bien mieux que les sondeurs et les experts.
La démocratie semi-directe suisse remplit ses quatre conditions. Par contre, les foules facilement manipulables par des démagogues, dont parle Gustave le Bon dans Psychologie des foules, ne remplissent aucun des quatre critères de l'intelligence collective. Ce type de foule n'est donc pas un argument contre la démocratie semi-directe.
Dans la démocratie semi-directe, toutes sortes de spécialistes participent à l’élaboration d’arguments aussi bien avec la société civile qu’avec le Parlement, parce que le plus souvent, les meilleurs arguments font gagner les votations et la paresse intellectuelle est punie dans les urnes. Certains politiciens craignent que la démocratie directe devienne une forme de "dictature des gilets jaunes". Cette crainte n'est absolument pas fondée, la Suisse est la preuve du contraire puisque la participation augmente avec le niveau des diplômes des votants. Le risque n'est pas la dictature d'une minorité, mais plutôt celle d'une majorité, un risque inhérent à la démocratie. Cependant, la démocratie suisse a surmonté ce problème, même lors des guerres de religion pendant le XVIe siècle. Si à l'intérieur d'un canton les habitants ne s'entendent pas à cause de barrières linguistiques (canton de Berne au XXe siècle) ou de différences de religion (catholiques - protestants au XVIe siècle), la population peut voter pour créer un nouveau canton. En plus, au niveau de la Fédération, chaque votation doit obtenir à la fois la majorité du vote populaire et la majorité des cantons (départements). Cette double majorité était conçue pour éviter que quelques grands centres urbains n'imposent leur volonté au reste du pays.
La démocratie directe amortie certaines critiques de la démocratie représentative. Les lobbies peuvent influencer ou acheter quelques parlementaires, il est plus difficile d’influencer 30% d'une population qui a l'habitude des débats contradictoires. Ensuite, aucun parti politique suisse n’ose raconter des mensonges pour gagner une votation comme les mensonges proférés lors du vote concernant le Brexit. Un tel parti politique menteur ne sera plus crédible pendant longtemps si les mensonges deviennent manifestes comme après le vote sur le Brexit. Avec en moyenne huit votations par an, réparties sur trois weekends, chaque parti politique souhaite être crédible à long terme. Avant chaque votation, la télévision et la radio publique organisent des débats, pendant lesquels personne n'a envie qu'on lui rappelle les mensonges précédents, dont les adversaires ne se priveraient pas.
Le référendum d'initiative citoyenne pourrait faire du bien à la démocratie d'un pays dans lequel un seul décide (le président de la République) et des millions exécutent et râlent. En Suisse, une critique n'a pas plus de valeur que la contre-proposition faite pour résoudre le sujet critiqué. Pendant l'épidémie de la Covid-19, les commentateurs politiques et l'opposition politique française ont critiqué tout et son contraire, le plus souvent sans faire des contre-propositions. Et si l'opposition faisait des propositions, elles venaient trop souvent après l'annonce de la décision du président. En Suisse, les râleurs entendent facilement la réponse "faits donc une initiative citoyenne" ou "qu'est-ce que vous proposez?". Même les démagogues sont obligés de faire des propositions concrètes, ce qui les met dans une position moins confortable qu'en France puisque leurs propositions peuvent être critiquées aussi.
Les limites d'un gouvernement jupitérien
Le livre montre qu'un gouvernement centralisé peut inciter les gens à construire des maisons et des bureaux mieux isolés pour économiser l'énergie. Une taxe carbone peuvent inciter les entreprises à investir dans la production d'énergie renouvelable. Le gouvernement centralisé peut également encourager la décarbonisation des processus industriels tels que la production d'acier à l'aide d'hydrogène et d'électricité. SSAB, une entreprise sidérurgique suédoise, possède une telle usine-pilote de production d'acier qui n'émet pratiquement pas de CO2. SSAB investit dans une nouvelle usine plus grande. Cependant, comme le montre un rapport de l'AIE de mai 2021, deux tiers de la réduction des émissions de CO2 doivent être effectués par des changements de comportements des citoyens. Un gouvernement démocratique possède un pouvoir limité pour imposer des mesures draconiennes à ses citoyens. Pour être démocratiquement acceptables, les choix difficiles devraient venir des citoyens éclairés. De tels choix peuvent être mis en œuvre si une majorité de citoyens les a votés par référendums. Mais pour que les citoyens votent pour des réductions d'émissions de CO2, ils ont besoin d'exemples pratiques tels que des quartiers à 2000 watts. La bureaucratie de l'état doit aussi montrer l'exemple et renoncer à un train de vie parfois bien trop somptueux et un millefeuille administratif bien trop complexe et donc trop couteux. Le but des 2000 watts devrait concerner tous.
Parfois, un Maire ou un président de région se comporte comme un « Jupiter » local, et dépense sans compter l’argent des autres pour des projets de prestige. Pour la bonne santé de la démocratie, il est donc aussi souhaitable que les dépenses élevées puissent être votées par ceux qui payent, les citoyens. Les élus deviennent automatiquement plus raisonnables s’ils risquent un revers dans les urnes pour une dépense jugée inutile ou disproportionnée. L'initiative citoyenne devrait donc pouvoir demander deux choses:
1) Exiger une votation populaire pour une loi votée par le Parlement ou pour une dépense votée par un Conseil municipal ou cantonal (départemental).
2) Proposer une loi cadre obligeant le Parlement et le conseil des ministres d'en débattre et de le proposer à un referendum.
En Suisse au niveau fédéral, les votations des initiatives citoyennes concernent des principes généraux ajoutés à la constitution. Le Parlement discute et vote ensuite les lois qui appliquent le principe général de la constitution. En France, l’initiative citoyenne ne devrait probablement pas avoir accès à la constitution, sauf si le président de la République la soutient avec une reformulation éventuelle du texte. Mais l'initiative citoyenne devrait pouvoir proposer une loi-cadre plus ou moins précise dont les détails sont discutés et votés par le Parlement.
Il est donc uniquement possible de faire des propositions de loi-cadre ou exiger un référendum pour une loi votée par le Parlement. Pour chaque référendum d’initiative citoyenne, le gouvernement peut faire une contre-proposition moins extrême et la soumettre au vote au même temps. En Suisse, il faut formuler une proposition de loi-cadre et ensuite, après vérification de la constitutionnalité de la proposition, collecter 100 000 signatures dans un délai de 18 mois. Les signatures et adresses sont vérifiées pour voir si le ou la signataire possède le droit de vote. Ce seuil de 100 000 signatures empêche environ une initiative citoyenne sur deux d’aboutir et d’être soumis au parlement et au référendum. Si le comité organisateur de l’initiative citoyenne a respecté les délais et le nombre de signatures, la proposition de loi doit être soumise au référendum, même si le gouvernement et le Parlement sont contre. Mais le gouvernement et le Parlement peuvent faire une contre-proposition moins extrême et la soumettre aussi au vote. En France, si le nombre de signatures était proportionel au nombre d'habitants, pour être comparable à la Suisse, le seuil d'une initiative citoyenne devrait être de 800 000.
En France, puisque la plupart des manifestations sont parasitées par une petite minorité violente, il devient extrêmement difficile de porter un message revendicatif par une manifestation, car les médias montrent surtout la petite minorité violente. C'est une raison de plus pour déplacer la démocratie directe depuis la rue vers les bureaux de vote en réduisant le seuil des 4 millions de signatures pour un referendum à 800 000 (les Français sont 8 fois plus nombreux que les Suisses) et le nombre de parlementaires soutenant l'initiative de 10% à 1%. Dans les urnes, les minorités violentes sont réduites à leur vrai poids plume.
L'argumentaire de deux votations suisses, issues d’initiative citoyenne, avec les arguments pour et contre des propositions de loi, peuvent être téléchargés ici:
Votation_loi_energie_mai_2017.pdf853.89 Ko
Votation_loi-aliments-equitables-sept-2018.pdf612.39 Ko
Deux semaines avant chaque votation, chaque électeur reçoit ce type de cahier contentant le texte de la loi et les arguments pour et contre du gouvernement, du parlement et des initiateurs de l'initiative citoyenne. Grandir dans une telle culture du débat produit un effet pédagogique considérable dans la population. C'est l'avantage principal de cette forme de démocratie.
Invité à réagir à une grande enquête par Harris Interactive, le président Macron a dit: « C’est une nation raisonnable, un peuple lucide qui se dévoile, ... un peuple lucide sur les difficultés auxquelles fait face le pays », lucide « sur les transformations à mener pour relever ces défis. ... Lucidité sur le fait que la lutte contre le dérèglement climatique passe non seulement par une action des pouvoirs publics, mais par des changements progressifs d’habitudes auxquels, là encore, les Français sont prêts »[2]. Un peuple raisonnable, lucide et prêt à changer d'habitudes devrait participer plus activement à la politique, non pas par la violence dans les rues, mais par la création d'initiatives citoyennes.
Limites de la démocratie directe en France
L’initiative citoyenne suisse ne correspond pas à ce que certains politiciens demandent pour la France. En Suisse, il n’est pas possible de révoquer un politicien ni aucune autre personne publique par référendum.
Appliquer le système de la démocratie directe de la Suisse à la France rencontre d'autres limites. En France au niveau local, les initiatives citoyennes ne devraient pas pouvoir proposer des nouvelles dépenses publiques, mais seulement soumettre des dépenses votées par le conseil communal au référendum local. Afin de permettre aux habitants d'une commune de proposer des nouvelles dépenses, il faudrait qu'au moins 75% de la population paye des impôts à la commune. Les citoyens doivent sentir les conséquences de leurs votations dans le montant des impôts à payer à la commune. Avec l'abolition des impôts locaux en France, ce retour d'information n'existe plus et le risque que la population vote pour des dépenses non finançables est trop grand.
Les trois menus donnent d’abord le texte de loi de chaque initiative citoyenne tel qu’il a été envoyé à chaque électeur et soumis au vote. Ensuite, sont développés les arguments pour et contre la proposition de loi. Habituellement, les arguments pour viennent du comité organisateur de l’initiative citoyenne, les arguments contre viennent le plus souvent du gouvernement et d’une partie du parlement. Les résumés des arguments sont aussi envoyés à chaque électeur. J’ai choisi trois votations avec trois niveaux de difficulté argumentatifs différents. En les lisant, on fera probablement le constat que les personnes n’aimant pas réfléchir n’iront pas voter, ce qui n’est pas un problème pour la démocratie et devrait rassurer le gouvernement. La participation sur des sujets complexes dépasse rarement les 35%, mais il est toujours plus difficile pour un lobby "d'acheter" un quart de la population que "d'acheter" quelques parlementaires.
Généralement, le débat consiste à pondérer chaque argument, à donner un poids à chaque argument, plutôt que d'affirmer que les arguments des autres sont faux. Parfois, les arguments sont basés sur des données fausses et si les données sont corrigées, le poids de l'argument est considérablement diminué. Le premier débat devrait permettre de se mettre d'accord sur les données. Ensuite, dans le processus de pondération de chaque argument, on retrouve généralement la philosophie de la personne qui argumente. Grandir et vivre avec ce genre de débat pendant toute une vie rapproche les citoyens des méthodes scientifiques et réduit la part de la population qui souscrit à des théories invraisemblables de complots.
Pour sauver la démocratie, il faudrait un changement de la culture du débat. Sans ce changement, la vision terrible de la société, décrite par Denys de Béchillon, professeur de droit public, risque de devenir réalité : "Qu'on le veuille ou non, la moitié du peuple - de ce peuple qui inspire les mœurs de la planète et dont nous ne devrions pas trop croire qu'il ne nous ressemble pas - a fait de l'égoïsme son credo, du renoncement à l'intelligence son principe, de l'irresponsabilité sa règle et de l'obscénité son style" (LExpress du 16 décembre 2020). Ce site espère démontrer que ce professeur se trompe et qu'une autre issue démocratique est possible.
Depuis très longtemps, certains étudiants, issus des classes aisées, sont attirés par les idéologies totalitaires (les idéologies de l'Union Soviétique et du Maoïsme, d'Enver Hodja et de Pol Pot, et aujourd'hui des Salafistes ou du Hamas), alors que les gilets jaunes demandaient plus de démocratie en forme d'initiatives citoyennes. Au XIVe et XVe siècle, la démocratie des cantons suisses a été obtenue par le combat des paysans, non pas par les classes privilégiées des grandes villes comme Zurich. Les classes dirigeantes et privilégiées de Zurich préféraient les princes allemands aux cantons démocratiques "de petits paysans montagnards", qui sont à l'origine de la confédération helvétique. Il n'est donc pas surprenant que les personnes subissant davantage les abus de pouvoir des puissants demandent aussi davantage de démocratie directe en forme d'initiative citoyenne.
Notes
[1] ˄ James Surowiecki, The Wisdom of Crowds, page 10. L'auteur donne des exemples concrets, pertinents et dans différents domaines.
[2] ˄ Challenges, Emmanuel Macron sur l'état de la France: "Un peuple lucide se dévoile", 01/09/2021