Transition énergétique vers la société post-pétrole
- Détails
A long terme, tout ce qui n'est pas durable n'a qu'une issue : sombrer et disparaître.
Contenu de cette page
- Défis pour atteindre la neutralité carbone en 2050
- Quelle croissance économique ?
- Puits de carbone ?
- Folie numérique et l'Intelligence Artificielle
- Comment réduire la consommation d'énergie ?
- Discours officiels et réalité
- Valeurs d'une société démocratique de 2000 watts
- Relever les défis dans une démocratie
- Photos d'écoquartiers 2000 watts et d'une coopérative d'habitants à Toulouse
- Conférence "Transition énergétique et limites de la croissance verte" (YouTube)
- Conférence "Bien vivre avec la rareté à venir" (YouTube)
- Conférence "Voies vers la transition énergétique et sociale" (YouTube)
Défis pour atteindre la neutralité carbone en 2050
Le livre "Pratiquement durable" essaye de montrer comment nos sociétés modernes peuvent réussir la transition vers une société post-pétrole sans trop de crises. Les défis à relever sont nombreux et certains problèmes gigantesques, mais, depuis 15 ans, les « Ecoquartiers 2000 watts » montrent un chemin prometteur pour réussir cette transition. D'après des calculs de l’École Polytechnique de Zurich, une consommation permanente de 2000 watts (48 kWh par jour) par chaque humain est considérée comme durable et peut être produite par des énergies renouvelables. La consommation actuelle d’énergie de 5000 à 10 000 watts par personne dans les pays développés n’est pas durable. Les calculs et estimations du livre montrent que la neutralité carbone, visée par l'Union européenne (UE), devrait correspondre à une société de 2000 watts, car nous n'aurons pas les moyens de produire davantage d'énergie de manière décarbonée, même en prévoyant une baisse régulière du coût d'investissement des énergies renouvelables et des moyens de stockage de l'énergie. Le livre fait la suposition optimiste que le volume de stockage d'énergie électrique avec le transfert de pompage d'eau sera multiplié par dix par rapport à l'année 2019 et que le reste de l'énergie sera stocké dans des batteries et des systèmes mécaniques. Il est aussi supposé que le stockage inter-saison sera fait par l'hydrogène vert (détails dans le livre).
Le niveau actuel de consommation d'énergie élevé pourrait au mieux durer encore 40 ans, si nous consommons toutes les énergies fossiles facilement exploitables (pétrole, gaz, charbon). Mais nous récolterons alors un réchauffement climatique de 3°C à 4.5°C et toutes les catastrophes et dérèglements qui en découleront, qui auront un coût encore bien plus élevé pour l'humanité que les investissements pour décarboner l'économie. Si les investissements dans le secteur de l'énergie sont multipliés par trois, l'UE pourra remplacer environ un tiers des combustibles fossiles par des énergies renouvelables ou décarbonées au cours des 30 prochaines années [1]. Si en plus aucune centrale nucléaire n'est fermée, nous pouvons créer la société de 2000 watts et la neutralité carbone jusqu'en 2050. Le livre montre qu'il faudrait donc multiplier les investissements dans le secteur de l'énergie par trois et en même temps diviser la consommation d'énergie par deux ou par trois [2].
Voici l'évolution de l'utilisation des énergies fossiles primaires, converties en Tera-Watt-heures (TWh). Montant pour 2019: 135 000 TWh.
Ces 135 000 TWh d'énergie fossile primaire correspondent à environ 100 000 TWh d'énergies utiles dans une économie décarbonée électrifiée. Selon les estimations optimistes, l'humanité devrait investir 240 000 milliards d'euros dans le monde pour remplacer toutes les énergies fossiles par des énergies renouvelables, 55 000 milliards d'euros dans l'Union européenne (UE). A titre de comparaison, 240 000 milliards correspondent à 320 années d'investissement de l'industrie pétrolière ou à deux fois et demie la somme des dettes obligataire de tous les États et entreprises du monde en 2020. En tenant compte de la baisse attendue du coût des énergies renouvelables jusqu'en 2050 et du niveau de recherche dans ce domaine, le livre décrit les hypothèses et méthodes de calcul et leurs résultats concernant les investissements nécessaires pour remplacer les énergies fossiles. Les détails des calculs sont disponibles dans le menu « Téléchargements et Liens ».
Par contre, pour chaque mégatonne de CO2 émise par une centrale électrique au gaz ou au charbon, nous sommes certains qu'elle provoquera le réchauffement climatique au cours des 1000 prochaines années. Comme tous les oxydes, le dioxyde de carbone est une molécule extrêmement stable. Il faut environ 10 000 ans pour que 90 % d'une mégatonne de CO2 émise aujourd'hui disparaisse de l'atmosphère.
En raison des coûts élevés des énergies renouvelables, aucune centrale nucléaire opérationnelle ne devrait être arrêtée pour des raisons idéologiques avant que la neutralité climatique ne soit atteinte ! Dans le cas des déchets nucléaires radioactifs, nous ne savons pas si le stockage définitif dans les couches profondes de la terre causera peut-être des problèmes imprévus dans 1000 ans.Puits de carbone ?
Certains experts recommandent la plantation d’arbres, car les forêts capturent des quantités importantes de CO2 en stockant le carbone dans le bois des arbres. Mais pour un stockage durable, le bois ne doit jamais être brûlé, ni pour le chauffage, ni pour la production d’électricité. Pourtant, le seul groupe Drax GB brûle chaque année 7 500 000 tonnes de bois dans ses centrales électriques. Ce bois est en grande partie importé des Etats Unis où les forêts sont considérées comme des « puits de carbone », même si le bois est brûlé en Angleterre et le carbone est ainsi de nouveau libéré dans l’atmosphère. Par ailleurs, une partie du bois servant aux chantiers de construction finit par être brûlée de même que les meubles déposés dans les déchetteries. Pour ces raisons, l’effet « puits de carbone » des forêts est largement surestimé. Nous estimons que seulement 6% des émissions des énergies fossiles peuvent être compensées par des puits de carbone, à moins de changer radicalement les méthodes agricoles.
Quelle croissance économique ?
En regardant la transition énergétique, il faut tenir compte de la forte corrélation entre la consommation d'énergie et la richesse produite (PIB), puisque notre richesse dépend largement du nombre de machines qui travaillent pour nous quelque part dans le monde, et toutes les machines ont besoin d'énergie. Réduire considérablement la consommation d’énergie implique une diminution des richesses produites par les machines et donc automatiquement une diminution du PIB et desIl existe toutefois quelques exceptions qui permettent de réduire la consommation d'énergie sans diminuer le PIB, comme améliorer l'isolation thermique des bâtiments ou remplacer les chauffages électriques par des pompes à chaleur.
Notre système économique et social présuppose une croissance à tout jamais, ce qui est une illusion sur une planète limitée. La réduction du PIB est une des raisons pour lesquelles l'évolution vers la société post-pétrole peut générer de nombreux conflits. Si la société ne s'organise pas autrement, par exemple selon le modèle des écoquartiers 2000 watts, ces conflits risquent de mettre fin à la démocratie et la prospérité. Les défis financiers sont tels que pendant le temps de la transition vers la société post-pétrole, nous aurons encore besoin de l'énergie nucléaire et il faut garder les centrales nucléaires existantes aussi longtemps qu'on peut garantir leur sécurité. Fermer des centrales nucléaires pour des raisons idéologiques est une preuve d’ignorance des défis financiers pour produire assez d'énergie décarbonée [3] et garder un bon niveau de vie.
Les scenarii de RTE France de 2021 et de l'Ecole Polytechnique Fédérale Suisse arrivent à peu près aux mêmes résultats et conclusions : Il faut diviser la consommation d'énergie par 2.5 ou par 3 ! Cela fera baisser le pouvoir d'achat de 40% à 50%. Mais comment bien vivre avec 2.5 fois moins d'énergie et un pouvoir d'achat en baisse ?
L'augmentation de l'efficacité énergétique grâce aux progrès techniques ne contribue que peu aux économies d'énergie. La plupart des progrès techniques dans le domaine de l'efficacité énergétique sont à nouveau perdus en raison des changements de mode de vie des utilisateurs. Selon des études de l'Agence Internationale de l'Energie (AIE), pour atteindre la neutralité carbone, l'humanité devrait améliorer l'efficacité énergétique de 5% par an au cours des 30 prochaines années. Cependant, au cours des 20 dernières années, l'humanité n'a amélioré l'efficacité énergétique que de 1,5% en moyenne, en commençant par les améliorations les plus faciles à réaliser. Le livre analyse ce problème et propose des solutions.
Les solutions techniques à elles seules ne suffiront pas, quoi que disent les économistes !
Investissements (CAPEX) pour remplacer 90% des énergies fossiles par des renouvelables et du nucléaire. Aussi inclus sont la production d'hydrogène pour le stockage inter-saison et la production d'acier par le processus "réduction directe" et les investissements dans les infrastructures électriques pour tripler le transport d'électricité.
Investissement production et stockage énergie, monde : 240 000 milliards $
Investissement production et stockage énergie, Europe : 55 000 milliards $
Dette cumulée des États et entreprises, marché obligataire : 100 000 milliards $
Les estimations pour produire et stocker l'énergie électrique sont basées sur les données du scénario optimiste du NREL (National Renewable Energy Laboratory). Le scénario optimiste suppose qu'il n'aura pas de pénurie de matières premières pendant les prochains 30 ans et que le coût de l'énergie pour fabriquer les équipements des énergies renouvelables et de leur stockage n'augmente pas. Cette supposition est optimiste, car la moitié des coûts des panneaux solaires et des batteries est déterminée par le prix des matières premières et l'AIE prévoit une pénurie de matières premières entre 2025 et 2030. Avec le scénario pessimiste, il faudrait multiplier les chiffres ci-dessus par deux.
Si donc même le scénario optimiste montre des montants d'investissement au-delà du finançable dans un cadre socialement acceptable, un changement de paradigme s'impose si nous voulons éviter un réchauffement climatique supérieur à 3.0°C !
La folie numérique et l'Intelligence Artificielle
Le livre montre aussi que la téléphonie 5G, l'interconnexion de milliards de nouveaux objets et la multitude de nouvelles fonctions Internet suscitées par la 5G, les Métavers et l'Intelligence Artificielle vont rapidement augmenter la consommation d'électricité. Selon les p révisions de l'Agence Internationale de l’Énergie (AIE) et une étude d’Anders Andrae, ingénieur chez Huawei, cette augmentation ira bien plus vite que l'électricité produite par les nouvelles installations d'énergies renouvelables [4]. Les nouvelles installations d'énergies renouvelables ne remplaceront donc pas l'énergie fossile, elles n'arriveront même pas à fournir l’électricité pour les nouvelles fonctions 5G et Internet. Déjà en 2021, l'ensemble des centres de calcul dans la ville de Francfort consommaient 1.6 fois plus d'énergie que les 400 000 foyers de la ville (FAZ, Serverfarmen in der Stadt, 17/10/2021). D'autres centres de calcul sont en cours de construction.
Le bilan énergétique devient encore beaucoup plus négatif avec les projets de réalité virtuelle aussi appelée "métavers". Le métavers est une représentation virtuelle de la réalité physique, par exemple des rues, paysages, magasins, discothèques et musées. La connexion au "métavers" se fera généralement à travers un casque de réalité virtuelle 3D qui enregistrent et envoient tous les mouvements, images et paroles des personnes connectées à un centre de données. Le "métavers" permettra à des amis, chacun dans son logement avec un casque de réalité virtuelle sur sa tête, de faire des promenades virtuelles ensemble, comme s'ils se promenaient ensemble dans une ville sur Google street-view, ou comme s'ils visitaient le musée du Louvre virtuellement ensemble. Dans tous ces lieux, ils pourront virtuellement rencontrer des gens qui se promènent aussi virtuellement au Louvre. Comme dans la vraie vie, en payant avec des vrais euros, les amis pourront acheter des gadgets de luxe virtuel pour impressionner les personnes virtuelles qu'ils rencontrent dans le "métavers". Ces projets de "métavers" produiront des quantités inimaginables de flux de données et augmenteront les besoins d’électricité en conséquence. Sans parler de la perte du dernier lieu de la sphère privé dans nos propres logements. Les activités dans le "métavers" ne diminueront pas les voyages, elles les augmenteront, comme l'ont fait les documentaires à la télévision sur la beauté des pays exotiques qui attirent toujours plus de touristes.
Supposons que le nombre de recherches fait avec des systèmes comme Chat-GPT4 égale un jour ceux fait par les moteurs de recherche comme Google et Qwant. Dans ce cas, les data-centers de Chat-GPT4 et de ses concurents consommeraient l'énergie de 20 centrales nucléaires. Détails dans le fichier Excel disponible dans le menu Télécharger. L'IA de type Chat-GPT n'augmentera que marginalement la productivité du travail, puisque les gains de productivité des écrivains et des journalistes seront compensés par le nombre croissant de vérificateurs pour éliminer les "fakes-news" et autres "vérités artificielles". Ces vérificateurs sont indispensables pour maintenir la démocratie en vie et leur travail va devenir de plus en plus compliquer avec les "deep fakes". En plus, de nombreuses professions telles que les avocats et juges utilisent leurs propres systèmes experts basés sur l'IA et n'ont donc pas besoin du contenu obsolète de Chat-GPT. Les avocats et juges ne souhaitent surtout pas les "préprompts internes" dont a besoin chat-GPT4 pour ne pas inspirer des criminels, mais qui donnent des réponses biaisées.
La miniaturisation des composants électroniques va atteindre les limites de la physique (fin de la loi de Moore). À partir d'environ 2026, l'efficacité énergétique des centres de calculs ne s'améliorera plus que marginalement et leur consommation d'électricité augmentera alors exponentiellement avec le volume des données.
Toutes ces évolutions sont en contradiction avec l'annonce des gouvernements de vouloir atteindre la neutralité carbone en 2050. Malheureusement, les décideurs politiques et économiques ignorent ce paramètre "énergie", bien qu'il soit à la base de notre civilisation industrielle. Si nous voulons éviter un réchauffement climatique supérieur à 3°C, le paramètre énergie doit devenir prioritaire dans nos choix politiques, économiques et de consommation.
Si les pays riches décident de maintenir leur consommation moyenne permanente d'énergie de 4000 à 6000 watts grâce à des investissements dépassant les 10% du PIB dans une sorte "d'économie de guerre" [5], ils n'arriveront jamais à convaincre les pays moins riches de renoncer aux énergies fossiles pour se développer, car le coût des énergies fossiles baisse si les pays riches en consomment de moins en moins. Pour décarboner leurs économies, les pays en développement ont besoin de l'aide des pays riches, car les pays riches importent des produits des pays en développement. L'Indonésie a promis de réduire les émissions de CO2 de 41% jusqu'en 2030 si le pays reçoit de l'aide des pays riches, mais seulement de 29% sans aide extérieure.
Les écoquartiers 2000 watts sont donc aussi des exemples d'une meilleure justice énergétique mondiale, des modèles pour rendre les pays riches plus crédibles.
Comment réduire la consommation d'énergie ?
A cause du réchauffement climatique, certains craignent "la fin du monde" si nous n'agissons pas vite et fort. D'autres, à cause de leur revenu modeste, craignent "les fins du mois". Pour sortir de ce dilemme entre "la fin du monde" et "les fins du mois", nous avons besoin d'un modèle pratique pour une vie économe en énergie et donc aussi économe en argent, car l'empreinte écologique correspond assez bien au pouvoir d'achat. Idéalement, ce modèle permet à tous de vivre mieux avec moins.
Plusieurs écoquartiers 2000 watts, gérés par des coopératives immobilières, ont considérablement réduit leur consommation d'énergie. Sans tenir compte de l'énergie grise [6] pour les infrastructures et les services de l’État, certains quartiers ne sont pas loin du but des 2000 watts de consommation permanente, ce qui correspond à un peu plus d'un tiers de la consommation d'énergie d'un habitant suisse en 2010. Le livre décrit les méthodes pratiques permettant à ces quartiers d'atteindre le but de la consommation d'énergie de 2000 watts. Cette réduction de la consommation d'énergie est aussi la meilleure réponse contre le réchauffement climatique, la justice sociale et une juste répartition des ressources de la planète.
Les bâtiments des écoquartiers 2000 watts consomment très peu d'énergie (10 à 12 kWh/m²/an), un cinquième de la norme française RT2012. Tout est optimisé pour une faible consommation énergétique, à commencer par le choix des matériaux de construction, l'architecture, la ventilation, l'optimisation de l'espace, etc. La consommation d'énergie du bâtiment est constamment optimisé. Le livre explique les points les plus importants permettant d'atteindre une telle efficacité énergétique.
La norme française RT2020 est presque aussi exigeante que la norme suisse Minergie-plus-eco. Construire des bâtiments respectant cette norme est vraiment difficile, surtout que mes conversations avec des entrepreneurs français du bâtiment montrent un manque terrible de formation pour respecter la norme RT2020. Pour cette raison, le livre de référence de la norme Suisse est mis à disposition dans le menu téléchargement. Ce livre bien illustré permet aux autodidactes de se former en attendant une offre adéquate de formation en France.
Réduire la consommation d'énergie d'une manière considérable implique aussi la réduction librement choisie du pouvoir d'achat individuel et la réduction de l'espace habitable individuel. Afin de maintenir un bon niveau de vie, les habitants des écoquartiers 2000 watts partagent de nombreux objets et infrastructures comme des ateliers de bricolage, un atelier de couture, des buanderies, des studios pour des invités, des salles de réunion, de fêtes et de coworking, un sauna, une bibliothèque, une salle pour des instruments de musique bruyants, mais aussi des voitures et vélos électriques appartenant à la coopérative du quartier. Le quartier facilite aussi le partage des habits et jouets entre enfants quand une famille n'en a plus besoin parce qu'un enfant a grandi. Les habits ne font pas des milliers de kilomètres avant d'arriver dans un magasin de seconde main. Ainsi, les écoquartiers 2000 watts partagent des objets et infrastructures de qualité dont on ne se sert pas souvent.
Avec le partage d'une partie des infrastructures, les appartements peuvent être plus petits, car les habitants peuvent louer des studios et espaces communs pour organiser des fêtes en famille ou entre amis. Malheureusement, l'évolution de la société va dans le mauvais sens depuis longtemps, car les surfaces habitables par habitant augmentent au même temps que la consommation d'énergie grise pour leur construction et entretien. Cette évolution annule en grande partie les gains d'efficacité énergétique des bâtiments.
Supposons que 32 familles d'un écoquartier 2000 watts partagent dans une buanderie commune 4 grandes machines professionnelles à laver le linge dont la durée de vie est de 25 ans. Comparons ces 4 machines aux 32 machines familiales, une par foyer, avec une durée de vie moyenne de 7 ans, durée moyenne en France. Produire une machine familiale consomme la moitié de l'énergie de la production d'une machine professionnelle. Ainsi, pour le seul objet de la machine à laver, l'énergie grise des habitants d'un écoquartier 2000 watts est divisée par 14 par rapport au ménage moyen en France. Avec les objets utilisés moins souvent que les machines à laver, comme les outils de bricolage et les machines à coudre, l'économie d'énergie grise est encore plus importante. Le livre développe l'ensemble des aspects des écoquartiers 2000 watts qui permettent de faire des économies d'énergie sans perdre de qualité de vie. D'autres aspects d'économie d'énergie concernent l’alimentation, les bâtiments, la mobilité, les loisirs et la vie sociale des quartiers. Ces quartiers pratiquent ainsi une décroissance librement choisie. Du point de vue du PIB les habitants sont plus pauvres, mais le sont-ils vraiment puisqu'ils ont une très bonne qualité de vie ?
Cependant, si les économies financières faites dans les domaines de l'habitation et de la mobilité quotidienne sont dépensées par ailleurs, le bilan énergétique ne s'améliore pas nécessairement. Pour cette raison, le livre mène une réflexion sur la manière de gérer le pouvoir d'attraction de l'argent, inspirée par des pratiques des écoquartiers 2000 watts les plus avancés, car l'empreinte environnementale et l'énergie utilisée sont à peu près proportionnelles à l'argent dépensé. (voir aussi "Le livre").
L'empreinte environnementale est à peu près proportionnelle à l'énergie utilisée. Voici la consommation moyenne permanente d'énergie primaire par habitant, sans les énergies grises pour créer et entretenir les infrastructures publiques :
Moyenne suisse par habitant : 6000 watts Habitation seule : 2000 watts
Ecoquartiers 2000 watts les plus avancés: 2800 watts Habitation seule : 600 watts
En France, des coopératives d'habitants ressemblent beaucoup aux écoquartiers 2000 watts en Suisse. Si les bâtiments de ces coopératives d'habitants respectent la norme française RT2020, ce qui n'est pas facile, elles peuvent arriver aux mêmes performances énergétiques que les écoquartiers 2000 watts en Suisse. Comme les quartiers 2000 watts en Suisse, les coopératives d'habitants en France réduisent l'utilisation d'énergie grise en partageant des infrastructures et des objets. Pour continuer à avancer vers un mode de vie compatible avec la neutralité carbone, avoir un but chiffré et mesurable (2000 watts) pourrait être une source d'inspiration pour les coopératives d'habitants ou pour tout autre quartier sensibilisé à la neutralité carbone. Quelques conseils à ce sujet se trouvent dans le menu "Télécharger, rubrique Coopératives d'habitants".
Est-ce que cette société de 2000 watts créera du chômage insupportable pour la société ? Restons sur l'exemple des machines à laver. Produire un petit nombre de machines (24 fois moins dans l'exemple ci-dessus) ne justifie plus de fortement automatiser les usines, ce qui économise de l'énergie. Créer des produits de très grande qualité avec une longue durée de vie nécessite des ouvriers bien qualifiés. Donc, produire des machines de très bonne qualité en plus faible quantité économise de l'énergie et crée des emplois. Les machines de haute qualité sont certes plus chères, mais le budget est partagé puisque plusieurs ménages partagent une machine. Si de surcroît l'égalité entre humains est orientée vers la consommation d'énergie, les salaires des plus qualifiés et des moins qualifiés se rapprocheront automatiquement puisque les extravagances matérielles cesseront d'être des symboles de réussite sociale pour devenir un signe de la destruction de la planète. Cependant, les riches pourront toujours acheter des montres mécaniques de luxe fait main, car fabriquer une telle montre consomme beaucoup moins d'énergie que la production d'une Apple-Watch électronique.
une chanson de Simon et Garfunkel.
Les écoquartiers 2000 watts ne sont pas une panacée à tous les problèmes humains. Le livre décrit quelques problèmes rencontrés dans ces quartiers et des solutions mises en place. D'autres problèmes ne manqueront pas de se manifester à l'avenir. Dans ce cadre, il peut être utile de savoir qu'il existe des notions de liberté, égalité, fraternité et de justice qui rendent le vivre ensemble plus ou moins conflictuel. Le livre propose des réflexions sur ces notions, car le vivre ensemble paisible dans un voisinage ne va pas de soi, surtout si les voisins partagent objets et infrastructures. Nos sociétés individualistes vont devoir réapprendre à vivre ensemble et gérer paisiblement les conflits entre voisins. Seule l'abondance d'énergie bon marché nous permet de vivre seuls, sans se soucier de personne, seul comme « un rocher qui ne ressent aucune douleur et une île qui ne pleure jamais », selonDiscours officiels et réalité
Lors du "Sommet de la Terre" en 1992 à Rio de Janeiro, la plupart des pays du monde ont décidé promouvoir le développement durable pour lutter contre la perte de biodiversité et le dérèglement climatique. En 1997 à Kyoto au Japon, ces décisions étaient renforcées. En 2009 à Copenhague, les pays ont décidé de limiter le réchauffement climatique à 2°C et en 2015 à Paris à viser un réchauffement inférieur à 2°C.
Mais
depuis que l'humanité a décidé de réduire les émissions de CO2 en 1992, elle les a presque doublées ! En plus, la réalisation des visions et projets transhumanistes ferait considérablement augmenter les besoins en énergie. Il est donc évident que la philosophie matérialiste à tendance transhumaniste, dominante autant en Chine qu'en Occident qu'ailleurs, est incapable de se limiter elle-même avant de percuter les limites de la planète. Percuter de nombreuses limites en pleine vitesse de croissance du PIB augmentera les catastrophes météorologiques et climatiques, produira des famines avec des migrations climatiques massives et provoquera probablement une multitude de guerres et guerres civiles.Selon le scenario le plus probable du New Energy Outlook de Bloomberg (NEO 2020), le système actuel nous mènera vers un réchauffement climatique [7] de 3.3°C en l'an 2100, à comparer avec 1.1°C de réchauffement depuis 150 ans. Selon ce scénario et vu l’inertie du système climatique, le réchauffement climatique se stabilisera probablement proche de 4°C, produisant des variations météorologiques toujours plus extrêmes. Le dernier rapport du Groupe Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC) est tout aussi alarmant. Même si les Etats respectaient leurs engagements pris à la COP21, ce qui n'est pour l'instant pas le cas, la planète se réchaufferait de 3°C d'ici 2100. Une vidéo du Economist donne un aperçu des conséquences d'un tel rechauffement (en anglais). Le coût d'adaptation à une météo plus extrême sera beaucoup plus élevé [8] que le financement de la société de 2000 watts. Même un jeune humain en bonne santé ne survit pas si la température est supérieure à 34°C et l’humidité supérieure à 90 % (ou 39°C et 50 %), ce qui sera le cas dans de nombreuses métropoles situées en bordure de mer, par exemple en Indonésie, Pakistan et Inde. Un réchauffement climatique de 3°C à 4°C se réalise si nous consommons toutes les énergies fossiles exploitables et si les énergies renouvelables ne servent qu'à compenser la baisse de production de pétrole et de gaz dû à l'épuisement des réserves.
En 2020, pendant l’épidémie de la Covid-19, de nombreux Etats avaient annoncé vouloir investir en tout 16 000 milliards de dollars pour la relance économique. Dans un rapport spécial, l’AIE a proposé qu’un quart de ce montant colossal soit utilisé pour développer les énergies renouvelables. En juillet 2021, l’AIE constate que seulement 2 % des 16 000 milliards sont prévus pour les énergies renouvelables et que les émissions de CO2 atteindront probablement un nouveau record en 2023.[9] D'après les accords de Paris de 2015, les émissions de CO2 devraient baisser de 20 % jusqu'en 2025, ... et l'humanité va probablement battre un nouveau record d'émissions.
Si nous tenons compte du bilan CO2 et de l’énergie grise importée, quasiment tous les pays évoluent dans le mauvais sens, systèmes économiques capitalistes ou communistes confondus. Puisque les pays aux systèmes politiques et économiques différents évoluent dans le même sens, le problème est probablement aussi de l’ordre philosophique et anthropologique, car une forme ou une autre de la philosophie matérialiste à tendance transhumaniste est assez dominante dans tous ces pays.
Jacques Ellul écrit à ce sujet dans "Vivre et penser la liberté" (p.235): L'homme est considéré exclusivement comme consommateur-producteur. C'est aussi bien dans la doctrine matérialiste communiste que dans la pratique matérialiste américaine par exemple. Dans les deux cas, l'homme est un instrument de production. Et toute sa vie est orientée vers ce seul but. ... On ne se préoccupe pas de l'homme en tant qu'homme mais en tant que producteur et tout l'intérêt qu'on lui porte n'est pas très différent de celui qu'on porte à la meilleure machine.
Valeurs d'une société démocratique de 2000 watts
Vue la différence entre les discours officiels et la réalité, il est indispensable de réfléchir sur les valeurs humaines qui encouragent de se limiter soi-même tout en laissant de la place au progrès scientifique. L'autolimitation signifie limiter volontairement son pouvoir d'achat et l'exercice de son pouvoir sur la nature et les autres humains, ce que Jacques Ellul appelle "une éthique de la non-puissance". Réduire les relations humaines à "la volonté de puissance" (Nietzsche) est incompatible avec les liens humains nécessaires à un niveau de vie agréable dans une société de 2000 watts. En opposition à l'évolution de la société depuis un demi-siècle, nous avons besoin d'une philosophie qui priorise les relations humaines à l'augmentation du volume de biens matériels, préfère la qualité à la quantité, apprécie la sérénité plus que les sensations de la vitesse et voit dans la nature plus qu'un moyen pour s'enrichir avec un droit d'exploitation.
En regardant l'évolution des nations industrialisées depuis 1992, il est difficile de s’imaginer comment une philosophie purement matérialiste pourrait produire une société qui valorise les relations humaines plus que les objets, machines, datacenters et équipements transhumanistes. Je ne vois pas comment une philosophie délibérément matérialiste peut inciter à renoncer librement au pouvoir d'achat individuel et donc au pouvoir sur la nature et d'autres humains.
Partager des infrastructures et objets du quartier nécessite des changements de valeurs des habitants, la culture individualiste consumériste n'en est pas capable, elle est trop centrée sur ses droits, l'augmentation du pouvoir d'achat et elle a une fausse notion de la liberté. Contrairement à ce que disent des publicités, rouler avec une grosse voiture 4x4 dans un paysage sauvage n'est pas un signe de liberté mais de suivisme. Sans changement des priorités des citoyens, jamais un candidat à la présidence de la République ne sera élu s'il promet une baisse régulière du pouvoir d'achat individuel pendant les prochaines décennies. La culture individualiste consumériste a quasiment divinisé l'argent et le pouvoir d'achat. Le livre développe des pistes pour diminuer l'influence de cette divinité sans pitié.
L'ensemble des problèmes et risques mentionnés invite à une réflexion sur la devise de la République : liberté, égalité, fraternité. Trop souvent, cette devise est réduite à un slogan creux. Mais une bonne compréhension de cette devise produit les valeurs qui seront indispensables pour bien vivre dans une société de 2000 watts, sans d'abord passer par le chaos civil et la répression et l'oppression d’État.
Puisque les initiatives pratiques viennent de leurs habitants et de leurs groupes de travail, ces écoquartiers 2000 watts ont besoin de liberté créative. Ensuite, une égalité de consommation d'énergie réduit considérablement les inégalités de style de vie, une réponse originale aux inégalités croissantes. Les inégalités actuelles dans nos sociétés produisent des jalousies et des désirs mimétiques (R.Girard) qui poussent à la consommation et rendent la réduction de la consommation d'énergie impossible. La fraternité facilite le partage d'infrastructures et permet de collaborer dans divers groupes de travail et de réflexion du quartier, même entre personnes d'origine très différente. Ces écoquartiers 2000 watts sont donc en opposition à la philosophie matérialiste qui produit une société toujours plus individualiste et consumériste, et pour laquelle la vie épanouie consiste principalement en la consommation de biens ostentatoires. Cette philosophie matérialiste s'exprime par des phrases comme "ceux qui n'ont pas une Rolex à l'âge de 40 ans ont raté leur vie". Elle se répand depuis environ 50 ans et possède une compréhension très particulière de la devise de la république. Cette philosophie matérialiste ...
- réduit la liberté des humains à celle de "machines biologiques" avec un large choix devant des rayons de supermarchés et le libre arbitre à une illusion psychologique (B.F. Skinner, G. Roth, J.P. Changeux);
- considère l'égalité des humains comme une illusion issue de mythes juifs et chrétiens (Y. Harari) et préfère un égalitarisme dont l'idéal serait une égalité de clones (A. Huxley);
- considère la fraternité comme une niaiserie ou un anachronisme, puisque les relations humaines sont surtout déterminées par les rapports de forces et la "volonté de puissance" (F. Nietzsche).
La tromperie la plus efficace de notre système socio-économique est de nous faire croire que la liberté consiste à faire ce que l’on désire, sans réflexion sur les conséquences et sans considérations morales. Cela permet aux publicitaires de manipuler les envies, aux chaînes de télévision de « vendre des minutes de cerveau disponible » et aux économistes de dire que « le moral des ménages est bon » parce que les ménages achètent sans compter. Les publicitaires d'un parfum suggèrent que la liberté consiste à faire des vacances dans un désert chaud sans transpirer. Cette forme de « liberté » est une tromperie puisqu’elle est trop facilement manipulable. Cette « liberté des envies » exige une croissance illimitée de la consommation et n’est pas pérenne car elle engendrera des problèmes écologiques et sociaux toujours plus graves et pourra à terme être utilisée comme prétexte pour réduire la liberté de tous. Un rapport de l'AIE de mai 2021, dont le chapitre 5 donne un bref aperçu, montre l'importance des changements des comportements humains pour réduire la consommation et pour atteindre la neutralité carbone. Le chapitre 7 du livre propose des réflexions sur une liberté qui libère de la propagande matérialiste et des désirs mimétiques humains qui poussent à toujours plus de consommation.
Le livre propose une philosophie capable de réussir la transition vers la société post-pétrole dans une démocratie, dans l'esprit des écoquartiers 2000 watts, et guidé par une phrase du philosophe Francis Schaeffer: "Chaque société évolue lentement, mais sûrement, vers les conclusions logiques de la philosophie dominante". En plus de dénaturer la devise de la République, la philosophie matérialiste à tendance transhumaniste réduit presque tout à son utilité économique, propose de résoudre les problèmes sociaux principalement par la croissance du PIB et divise la société en une multitude d'identités communautaristes selon le principe "divide et impera", diviser pour régner (Machiavel).
Depuis bientôt 30 ans, des universités américaines enseignent des théories qui divisent la société en une multitude de communautés plus ou moins irréconciliables avec comme identité principale d'être victime des autres identités. Ces théories encouragent un narcissisme identitaire et ont des conséquences bien visibles dans leur pays d'origine. Aujourd'hui, les grands centres urbains aux États-Unis sont davantage ségrégés et fracturés qu'en 1990 [10]. Il y a 30 ans, la ségrégation était surtout ethnique, aujourd'hui elle est en plus politique (Républicains et Democrates n'habitent de moins en moins dans les mêmes quartiers), religieux et sociale. Robert Putnam, historien américain, a démontré que plus une ville américaine est multiculturelle, plus le bien commun est réduit, car chacun est alors tenté de défendre principalement son bien et celui de sa communauté. Ainsi, l'incompréhension mutuelle, la méfiance et la polarisation affective entre les communautés augmente sans cesse [11]. Robert Putnam voit le début de ce processus dans les années 1980. Depuis, les gens ont cessé d'aspirer à réparer la société et ont commencé à ne penser qu'à se "réparer" eux-mêmes et leur communauté proche. A terme, ce processus a d'autres conséquences. Plusieurs études ont montré qu’environ 70 % des étudiants américains ont davantage de traits narcissiques et moins d’empathie qu’il y a 30 ans, attitudes qui favorisent le système consumériste et la solitude [12], une solitude de consomateur ermite. L'idéologie soi-disant "éveillée" des universités américaines ressemble aux religions hyper-légalistes qui ont produit des quantités d'interdits [13]. Cependant, à la différence des religions légalistes, les administrations des universités américaines prononcent d'abord la condamnation des mal-pensants et formulent l'interdit par la suite. Une écologie inspirée par cette idéologie va inévitablement susciter du rejet et de la haine. Le livre montre les conséquences désastreuses de cette idéologie et fait des propositions concrètes d'une autre philosophie qui permet une meilleure lutte contre les abus de pouvoir de toute sorte, qui encourage la fraternité, le soutien aux plus faibles, l'amour du prochain [14].
Les écoquartiers 2000 watts les plus avancés recherchent activement une mixité culturelle, sociale, économique et générationnelle, le contraire de la ségrégation des villes "progressistes" américaines. Ces quartiers proposent un cadre qui encourage des humains d'origine diverses à vivre et travailler ensemble pour atteindre un but commun (2000 watts). Ainsi, à cause de leur mixité sociale et culturelle, les différents quartiers n'entrent ni dans une concurrence victimaire ni dans une culture d'affrontement. Le livre montre le fonctionnement, les avantages sociaux et économiques et le mode de vie de ces écoquartiers. Étant donné que les pauvres ne peuvent pas considérablement réduire leur niveau de vie sans être poussés à des émeutes de la faim, des quartiers socialement diversifiés sont beaucoup plus résilients que des villes ségrégées et fracturées. Car, soit nous réussirons la société de 2000 watts ensemble en cultivant la fraternité, soit nous échouerons ensemble avec un fort réchauffement climatique et des crises suffisamment graves pour déchirer nos sociétés démocratiques. Le préambule de la constitution suisse exprime ce besoin de cohésion sociale avec ces mots: "La force d’un peuple se mesure au bien-être du plus faible de ses membres" [15]. Pour réussir la société de 2000 watts, mieux vaut s'inspirer des écoquartiers 2000 watts que des théories universitaires qui ont prouvé tout leur pouvoir de polarisation destructive pour la société américaine.
La valeur d'un être humain devrait être intrinsèque à son humanité. Pour réussir la société de 2000 watts, un ouvrier devrait avoir la même estime aux yeux de la société qu'un PDG d'une entreprise du CAC 40, même si les deux n'ont pas le même salaire. Construire des bâtiments qui respectent la norme RT2020 est tellement difficile qu'il nécessite des ouvriers fiers de leur métier. Malheureusement, la philosophie matérialiste évalue presque tout par son utilité économique et pense que "dans des gares on rencontre des gens qui ne sont rien". Qu'on y rencontre des gens qui n'ont rien est un fait, qu'ils ne sont rien est un révélateur philosophique.
En 2020, En 1965, environ 40% des jeunes Amish ont définitivement quitté leurs communautés, ils sont moins de 5% aujourd'hui, parce qu'aujourd'hui, la vie dans nos sociétés individualistes consuméristes est probablement devenue moins attrayante. (Les jeunes Amish ont toujours été encouragés à quitter leurs communautés pour une durée de 3 mois à 2 ans afin d'expérimenter la vie dans la société et avant d’éventuellement choisir le retour dans leur communauté).
en plein débat sur l'adoption de la téléphonie 5G, le président de la République a comparé les écologistes à des Amish qui rejettent de nombreux progrès techniques et veulent un retour à la lampe à huile. Les photos en bas de page montrent que la vie dans les écoquartiers 2000 watts est agréable et ne ressemble en rien à une vie d'Amish, même si ces quartiers n'ont probablement pas plus d'utilité pour la 5G que les Amish. Au même temps, les Amish que nous avons rencontrés aux États-Unis semblent bien plus heureux dans leur mode de vie que de nombreuses personnes dans nos sociétés individualiste et consumériste.Relever les défis dans une démocratie
Les sociétés déchirées par des conflits internes violents terminent souvent dans une dictature politique. Depuis 50 ans, la concentration des pouvoirs politique et économique ne cesse d'augmenter et ce processus décrédibilise de plus en plus nos démocraties. Au même temps, les tensions entre les grands centres urbains et le reste du pays, elles aussi, ne cessent d'augmenter, un problème par ailleurs vieux de 5000 ans. Les éoliennes risquent devenir les prochaines victimes de ces tensions. Inspiré par plusieurs écoquartiers 2000 watts, le livre montre comment ces tensions entre les métropoles et le reste du pays peuvent être transformées en collaboration. Cette collaboration est même indispensable pour garantir l’alimentation dans la société post-pétrole. L'agriculture intensive, trop énergivore, n'est pas durable. En plus, d'autres formes d'agriculture peuvent stocker de grandes quantités de CO2 dans le sol. Ainsi, en plus de nourrir le pays, l'agriculture pourrait contribuer considérablement à la lutte contre le réchauffement climatique, si seulement les élites des métropoles traitaient la ruralité autrement.
Le nombre d'agriculteurs a été divisé par 4 en 40 ans. Ils ont été remplacés par des machines et techniques énergivores et polluantes, imposées aux agriculteurs par des cadres d'entreprises et d'administrations depuis des grands centres urbains. C'est une politique inapte à la transition énergétique et pousse la ruralité vers la révolte. Les nombreuses installations de production et de stockage d'énergies renouvelables ne peuvent pas être imposées à la ruralité sans une collaboration apaisée entre la ruralité et les métropoles, car il n'est pas possible de protéger toutes les éoliennes par des CRS. Plusieurs écoquartiers 2000 watts, situés dans des grands centres urbains, peuvent servir de modèles de collaboration et de sensibilisation mutuelle entre citadins et ruraux. Dans tous ces domaines, les conséquences de nos choix auront une portée historique. Le livre décrit ces problématiques et des solutions.
Une autre hypothèse du livre est qu'une démocratie semi-directe comme en Suisse fortifie la démocratie et le débat démocratique raisonnable. C'est un rempart contre les dérives démagogiques et dictatoriales. La démocratie directe sert surtout à apprendre aux citoyens à réfléchir, à s'instruire, à mener des débats raisonnables et contradictoires, à se forger une conviction en analysant une liste d'arguments "pour" et "contre" une proposition, et à se sentir concerné par le projet commun d'un pays. Les habitants ont généralement une vision à long terme, ils se soucient de la vie de leurs enfants et de leurs petits-enfants. Les politiciens ont généralement une vision à court terme qui dépasse rarement la durée de leur mandat politique. Il ne devrait donc surprendre personne que des citoyens instruits votent pour des changements qu'un gouvernement central et hors-sol n'ose pas imposer. Est-ce que la démocratie directe aurait un effet pédagogique, politique et culturel positif en France, sans devoir attendre un siècle? (En Suisse, la démocratie directe avec initiative citoyenne existe depuis 1891). Un article dans le menu "Radio" explique les principes de l'intelligence collective.
Dans l'histoire de l'humanité, en dehors de la Suisse, aucune démocratie n'a atteint l'âge de 300 ans. Sans l'aide des États-Unis, les démocraties européennes auraient disparu il y a 80 ans. Aujourd'hui, après 250 années d'existence, la démocratie américaine est gravement malade. Concernant les risques pour la démocratie, le philosophe Emmanuel Levinas nous avertissait avec ces mots "La liberté consiste à savoir que la liberté est en péril" (Totalité et Infini, Essai sur l'extériorité). C'est une raison supplémentaire qui rend utile une réflexion sur la liberté dans une société 2000-watts.
Les écoquartiers 2000 watts montrent que la transition vers la société post-pétrole est en grande partie le résultat d’un processus démocratique venant des habitants de ces quartiers et leurs nombreux groupes de discussion et de travail. Augmenter la taxe de l’essence de quelques centimes a produit la révolte des gilets jaunes et neuf mois de violence. Dans une démocratie, un pouvoir central hiérarchique n'arrivera pas à considérablement baisser le PIB tout en garantissant une bonne qualité de vie. Le livre développe aussi la thèse que les changements profonds nécessaires pour réussir la transition vers une société de 2000 watts viennent plus facilement par une démocratie semi-directe et de ses referendums que par une voie hiérarchique habituellement contestée. Ainsi, depuis 12 ans, les habitants de plusieurs grandes villes suisses ont voté pour évoluer vers la société de 2000 watt, et en 2017, les citoyens Suisses ont voté pour une loi exigeant une baisse de 43% de la consommation d'énergie jusqu'en 2035. Mais pour convaincre les citoyens, les sociétés démocratiques ont besoin d'un modèle d'un mode de vie durable qui donne envie d'être imitée. Les écoquartiers 2000 watts ont été conçus dans ce but et semblent donner raison aux chercheurs de l’École Polytechnique de Zurich à l'origine du concept. A ce jour, il existe 39 écoquartiers 2000 watts, hébergeant entre 300 et 3000 habitants et offrant à peu près autant d’emplois. Voyant la vie dans ces quartiers, les citoyens votent plus facilement pour les changements nécessaires à la création d'une société de 2000 watts. Ces changements, votés en référendum le plus souvent par des majorités confortables, ne sont pas contestés par la suite.
L’hypothèse du livre est que, face aux mêmes arguments, les Français voteraient à peu près comme les Suisses. Plusieurs argumentaires des votations sont donc disponible dans le menu "Intelligence collective". Pour aller dans le sens de la démocratie semi-directe, le gouvernement français pourrait par exemple légèrement changer une loi existante et baisser le seuil du referendum d'initiative partagée de 4,5 millions de pétitionnaires à un million et le nombre de parlementaires à 1% des membres du Parlement.
Photos d'écoquartiers 2000 watts et d'une coopérative d'habitants à Toulouse
Parking des voitures électriques appartenant à la coopérative "plus qu'un logement", avec station de charge électrique. Ces voitures peuvent être louées facilement en utilisant l'application spécifique du quartier pour téléphones portables. La même application sert aussi à surveiller sa consommation d'énergie en temps réel, de faire une réservation dans un des restaurants du quartier, de réserver et louer une salle commune, etc.
La copropriété ci-après ne fait pas partie d'un quartier 2000 watts, mais ses habitants ont pris la votation concernant la société de 2000 watts au sérieux. Ils ont écrit leur contrat avec le reste du monde sur la façade de l'immeuble. L'immeuble se trouve à l'adresse Badenerstrasse 380, 8004 Zürich. Voici la traduction du contrat (allemand "Vertrag") :
Les habitants de cet immeuble s'engagent par ce contrat à réduire leur consommation constante d'énergie à maximum 2000 watts. En cas de non-respect de cet engagement, le reste du monde possède le droit de dommages-intérêts. Lieu de Juridiction : Zürich. Droit en vigueur : droit suisse. Signé : les habitants de cet immeuble.
Notes
[1] ˄ IEA, World energy investment 2019, page 19: En 2018 en Europe, 140 milliards ont été investis dans l’ensemble du secteur de l’énergie: production d’énergies fossiles, production d’électricité avec du charbon, des renouvelables et du nucléaire. En plus, 70 milliards ont été investis dans l’amélioration de l’efficacité énergétique, comme l’isolation des bâtiments. Pour remplacer un tiers des énergies fossiles par des renouvelables ou décarbonées et créer la société de 2000 watts, il faudrait investir 400 milliards par an en Europe pendant les prochaines 30 années. Il faudrait donc multiplier les investissements actuels par trois. Entre un quart et un tiers des énergies fossiles peut être économisé par des gains d'efficience énergétique (p.ex. meilleure isolation des bâtiments) et plus d'un tiers doit être économisé par une réduction des richesses individuelles (réduction du PIB).
[2] ˄ Rte, Futurs énergétiques 2050, octobre 2021. Les différents scénarios du dernier rapport de Rte montrent qu'il faudrait diviser la consommation d'énergie par deux jusqu'en 2050, toutes sources d'énergie confondues. Rte prévoit une légère réindustrialisation de la France, mais ne tient pas assez compte du bilan négatif des énergies grises importées et exportées (voir note 6).
[3] ˄ Après avoir terminé ses calculs, les chiffres astronomiques ont poussé l'auteur à abandonner 40 années de militantisme anti-nucléaire. Le but du livre n'est donc pas de faire une description éloquente d'une théorie idéale, mais de proposer des solutions pratiques et faisables. Le livre discute différentes options nucléaires. Cependant, à cause de l'investissement initial et du coût long terme élevé des stations nucléaires, remplacer toutes les énergies fossiles par l'énergie nucléaire dans le monde n'est pas non plus la solution du problème des moyens limités de l'humanité. Pour remplacer toutes les énergies fossiles, l'humanité devrait installer et protéger plus de 100 000 minicentrales de 100 MW.
[4] ˄ Total Consumer Power Consumption Forecast, par Anders Andrae, page 20. Cette étude d’Anders Andrae corrige vers le bas une étude plus ancienne du Prof. Peter Corcoran de l’université nationale d’Ireland: Emerging Trends in Electricity Consumption for consumer ICT. Anders Andrae propose plusieurs scénarios concernant les gains d'efficience énergétique des centres de calcul. Le livre utilise des chiffres entre les deux scénarios « attendu » et « optimiste ». Les chiffres supposent que la loi de Moore sera obsolète entre 2024 et 2026, car les investissements pour les nouvelles usines de fabrication de circuits électroniques augmentent d'une manière exponentielle depuis 10 ans. Les investissements pour une nouvelle production de circuits avec des structures de 5nm atteignent environ 50 milliards en 2022 et il n'y aura probablement plus que deux ou trois entreprises dans le monde capables d'investir 120 milliards pour produire des structures de 3nm. En plus, la performance des processeurs n'augmente que peu avec la réduction des structures. Pour toutes ces raisons, l'efficacité énergétique des centres de calcul augmentera beaucoup moins vite que le volume des données à traiter. Il est donc fort probable que la consommation d'électricité augmentera selon les prévisions d'Anders Andrae.
[5] ˄ Entre 1942 et 1944, les Etats Unis ont converti toute leur économie pour produire en priorité du matériel de guerre : camions, avions, bateaux, munitions, etc. Ils n'ont plus produit ni de machines à laver ni de voitures pour les particuliers. Du fait de la perte de notre base industrielle en 2020, un "effort de guerre" aurait des conséquences similaires et sera socialement inacceptable.
[6] ˄ Energie grise : C'est l'ensemble de l'énergie nécessaire à fabriquer des objets, à commencer par l'extraction des minerais jusqu'à l'emballage de l'objet fini. La France importe beaucoup d'énergie grise car elle possède une balance commerciale négative, exporte beaucoup de services et importe des produits manufacturés. Fabriquer des objets en série par milliers consomme beaucoup plus d'énergie que leur conception dans un bureau d'études.
[7] ˄ Toutes les molécules composés d'au moins trois atomes (H2O, CO2, CH4, N2O,...) absorbent la lumière infrarouge émise par la Terre et laissent passer le reste du spectre de la lumière du Soleil. La lumière infrarouge absorbée par ces molécules, augmente leur température. Puis, elles diffusent leur chaleur dans toutes les directions, dont environ la moitié en direction de Terre. Cet effet physique s'appelle effet de serre et produit le réchauffement climatique. Cet effet a aussi pour conséquence le refroidissement des hautes couches de l’atmosphère. Ainsi, la différence des températures entre les basses et hautes couches de l’atmosphère devient plus grande, ce qui augmente les courants convectifs verticaux, et donc la puissance des tempêtes tropicales. En plus, des molécules comme le CO2 sont extrêmement stables, comme tous les oxydes, ce qui rend le processus du réchauffement climatique, à échelle humaine, quasi irréversible.
[8] ˄ Exemples: Suite aux feux de forêts en Californie des dernières années, selon la société de courtage immobilier Redfin, des biens immobiliers d'une valeur de 2000 milliards de dollars se trouvent dans des zones à risques d'incendies de forêt. Depuis les inondations de 2019, dans la seule ville texane de Houston, 220 000 maisons se trouvent dans des nouvelles zones à risques d'inondation. Dans la ville australienne Lismore, en 5 ans, il y a eu 1 sécheresse avec des feux de forêt et 2 inondations, des événements qui devaient arriver 1 fois par siècle selon les assurances. Conséquences: dans ces zones, les primes d'assurance augmentent rapidement et le prix des maisons chute. Ces pertes indirectes ne figurent pas dans les calculs des coûts des catastrophes. Calculées pour le monde entier, les pertes indirectes et directes sont déjà colossales, et elles vont augmenter exponentiellement avec chaque degré de réchauffement climatique. En 2020 aux États-Unis, les pertes directes à cause des incendies et inondations étaient de 95 milliards de dollars (TIME, 17/05/2021 p.67). Les pertes sont estimées à 2000 milliards de dollars en 2100 (The Economist, 11/06/2022, p.42). La "Global Commission on Adaptation" (GCA) écrit dans son dernier rapport qu'il faut aussi investir pour s'adapter au dérèglement climatique, par exemple investir pour rendre les infrastructures plus résilientes, développer une agriculture sans irrigation et protéger les mangroves. 1$ investi aujourd'hui évitera des pertes de 7$ en 2030.
Les pertes directes et indirectes ainsi que les investissements nécessaires à la protection contre le réchauffement climatique ont été calculés et estimés en 2006 par Nicholas Stern, chef economiste du gouvernement britanique, dans son volumineux rapport "Review on the Economics on Climate Change", London School of Economics. Le rapport est très bien documenté, ... et a été largement ignoré. Dans le quotidien Le Monde du 26 avril 2021, Nicholas Stern fait ce constat : "Sur les 77 000 articles publiés par les revues académiques les plus réputées en économie, seuls 57 concernaient le thème du changement climatique, soit une proportion de 0,074 %". L'idéologie des économistes reste enracinée au 20e siècle.
[9] ˄ IEA, Sustainable Recovery Tracker, July 2021. En plus, la demande de charbon pour produire de l'électricité augmentera considérablement.
[10] ˄ Institut Othering & Belonging de l'université Berkley Californie, "Most to Least Segregated Cities" : En 2019, 80% des villes de plus de 200 000 habitants avaient une ségrégation raciale, ethnique, sociale et politique plus importante qu'en 1990. Cette ségrégation augmente la polarisation et la fracture de la société. Stephen Menendian, directeur de l'institut universitaire, conclu: "Ce pays est toujours en piteux état".
[11] ˄ Stanford Institue for Economic Policy Research, Cross-country trends in affective polarization, jan.2020. "La polarisation affective" est une expression savante pour décrire "la haine entre communautés". En 1978, sur une échelle de 0 à 100, les Américains évaluaient à 27 leur différence de sentiments envers les membres de leur parti et ceux de l'autre parti politique. Sur cette même échelle, en 2019, si les Américains apprennent pour quel parti une personne vote, la différence de sentiment est passée à 56. Selon cette même publication, les partis politiques américains sont devenus des "conglomérats de tribus identitaires". Dans des pays comme l'Allemagne, la Norvège et la Suisse, "la polarisation affective" a baissé depuis l'an 2000.
[12] ˄ Psychology Today, Why Is Narcissism Increasing Among Young Americans?, Peter Gray, Jan 2014
[13] ˄ Le droit cannonique contient 1752 articles, le judaisme talmudique contient 613 lois, les 4 écoles juridiques de l'islam sunnite produisent des lois et de la jurisprudence en grande quantité depuis 900 ans.
[14] ˄ Ledru-Rollin du gouvernement provisoire de la France de 1848 écrits dans une circulaire adressée aux représentants des départements : "La fraternité, c’est la loi de l’amour unissant les hommes". Pour Jésus de Nazareth, l'amour du prochain est le commandement le plus important et résume toutes les 613 lois du judaïsme.
[15] ˄ Préambule de la constitution suisse : « Au nom de Dieu Tout-Puissant ! Le peuple et les cantons suisses, conscients de leur responsabilité envers la Création, résolus à renouveler leur alliance pour renforcer la liberté, la démocratie, l’indépendance et la paix dans un esprit de solidarité et d’ouverture au monde. […] La force d’un peuple se mesure au bien-être du plus faible de ses membres ».